Impact de l’épidémie de COVID-19 sur la santé mentale des travailleurs et leurs comportements addictifs pendant le confinement

Santé publique France publie une synthèse des résultats de trois enquêtes réalisées en 2020 visant à estimer l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les troubles anxio-dépressifs, la consommation d’alcool et de tabac parmi les travailleurs.

Publié le 19 janvier 2023
Dans cet article

Depuis la mise en place du premier confinement en mars 2020, dans le cadre de la gestion de la pandémie de COVID-19, des mesures de distanciation sociale ont notamment été mises en place pour limiter la propagation du virus. Au niveau professionnel, cela s’est traduit par des modifications importantes des conditions de travail, avec notamment pour certains travailleurs la mise en place du télétravail plus ou moins contraint, des situations de chômage partiel ou encore d’autres modifications des organisations de travail (décalage des heures de travail, diminution des contacts avec les collègues ou le public etc…). Les modifications organisationnelles induites par ce contexte inédit ont pu être source de satisfaction ou de tension.

Santé publique France a analysé les données de trois enquêtes afin d’investiguer les troubles anxio-dépressifs, la consommation de tabac et d’alcool, ainsi que les troubles du sommeil parmi les actifs occupés en période de pandémie, au travers des données de trois enquêtes menées par Santé publique France en 2020 ou ayant impliqué son expertise. 

Les principaux résultats montrent un impact négatif de la pandémie et des modifications des organisations de travail associées sur la santé mentale des travailleurs.

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Synthèse des résultats des études de l'impact de l'épidémie de COVID-19 sur la santé mentale, les addictions et les troubles du sommeil...

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L’enquête Coviprev 

Cette enquête, menée par web-questionnaire par Santé publique France en population générale a permis d’étudier tout au long de l’année 2020* l’évolution d’un certain nombre d’indicateurs de santé des actifs occupés, incluant la santé mentale (anxiété et dépression), la qualité du sommeil, les facteurs associés et la satisfaction vis-à-vis de la vie actuelle et futures.

Quels sont les résultats ?

30,5 % des actifs occupés ont déclaré des symptômes d’anxiété au début du confinement en mars 2020 contre 15,9 % fin juin 2020 et environ un actif sur cinq présentaient des symptômes dépressifs au début des deux périodes de confinement (évolution en « U »). Au début du confinement en mars 2020*, les troubles du sommeil touchaient environ deux tiers des actifs occupés et étaient plus fréquents chez les femmes que chez les hommes.

L’impact sur la santé mentale est associé à l’évolution des modalités de travail. Ainsi, en plus du  sexe, de l’âge et de la catégorie socio-professionnelle), la promiscuité au sein du foyer, les organisations de travail et la situation financière perçue comme précaire ont également joué un rôle dans la survenue de l’anxiété et/ou de la dépression chez les populations interrogées. 

Parmi les secteurs d’activité les plus à risque, un point de vigilance est à souligner en 2020 pour les secteurs de l’enseignement, les activités des arts et spectacles, les assurances et finances.

*Les évolutions des indicateurs sont également disponibles après 2020, l’enquête ayant continué en 2021 et 2022.

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Évolution des symptomatologies anxieuses et dépressives et leurs facteurs associés chez les actifs occupés en France métropolitaine en ...

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CoviPrev : une enquête pour suivre l’évolution des comportements et de la santé mentale pendant l'épidémie de COVID-19

L’enquête Coset-Covid

Cette enquête, réalisée par Santé publique France, a permis d’évaluer la prévalence de troubles anxio-dépressifs en sortie de confinement en juin 2020 et de comprendre le rôle des changements observés dans la situation professionnelle et des facteurs organisationnels, chez les travailleurs indépendants et ceux du monde agricole. Elle s’est appuyée sur les deux cohortes Coset-Indépendants (N=20 368) et Coset-MSA (N= 27 044) pilotées par Santé publique France qui permettent un suivi sur le long terme de nombreux travailleurs salariés, travailleurs du monde agricole et travailleurs indépendants recrutés en 2017-2018.

Quels sont les résultats ?

Certains groupes professionnels présentaient une prévalence plus importante d’anxiété et de symptomatologie dépressive au sortir du confinement en juin 2020, dont la fréquence apparaissait liée à des conditions de travail défavorables durant le confinement, telles qu’une augmentation des tensions relationnelles avec le public ou les collègues, une augmentation des heures de travail ou un décalage de ces heures en week-end ou en soirée, ou encore une impossibilité de s’isoler pour travailler à domicile. 
Chez les indépendants non‑agricoles et les salariés agricoles ayant des activités de bureau, les troubles du sommeil se sont accentués lors de cette période pour plus d’un quart des hommes, et plus d’un tiers des femmes.
Chez les indépendants non agricoles et les salariés agricoles ayant des activités de bureau, une personne sur 6 a augmenté sa consommation d’alcool.

Une nouvelle vague d’enquête a été lancée en 2022 pour évaluer dans quelles mesures les changements observés dans la situation professionnelle et leurs liens avec l’état de santé ont évolué dans les populations actives des indépendants et du monde agricole. Les résultats seront disponibles en 2023.

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Conséquences professionnelles et état de santé des travailleurs du monde agricole et des indépendants au sortir du premier confinement ...

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Enquête Coset-Covid : impact de l’épidémie de COVID-19 sur les travailleurs indépendants et travailleurs du monde agricole

L’enquête sur l’évolution des conditions de travail et consommation de substances psychoactives en période d'épidémie

Cette analyse a été réalisée à partir des données de l’enquête pilotée par la MILDECA, menée auprès des salariés en lien avec Santé publique France, l’Anses, INRS, OFDT et le COCT. Cette étude a permis d’étudier les modifications de la consommation d’alcool et de tabac pendant la 1re période de confinement puis en reprise d’activité entre mars et mai 2020.

Quels sont les résultats ?

Après avoir interrogé plus de 4000 salariés du secteur public et du secteur privé représentatif de la population active sur l’évolution de leur consommation de SPA, il a été constaté que 30 % des personnes interrogées déclaraient avoir augmenté leur consommation de tabac contre 14 % pour l’alcool. Chez les hommes, l’augmentation de la consommation de tabac pendant le confinement était associée à une augmentation de la charge de travail alors que pour les femmes, elle était associée à une diminution de la charge de travail habituelle. Pour l’alcool, le fait de déclarer avoir eu une charge de travail moins importante que la charge de travail habituelle était associé à un risque accru d’augmenter sa consommation et ce uniquement pour les femmes.

Mieux prévenir et protéger la santé mentale des travailleurs : un enjeu pour la santé au travail

Dans ce contexte de modifications des organisations et des conditions de travail, inscrites dorénavant dans le temps, la réduction des troubles de la santé mentale des travailleurs représente un enjeu. En partenariat avec les principaux acteurs en santé travail, Santé publique France poursuivra ses travaux de surveillance de la santé mentale des travailleurs, notamment par l’analyse des données issues des cohortes COSET (travailleurs salariés et non-salariés du monde agricole et travailleurs indépendants) et du dispositif des maladies à caractère professionnel (MCP). Ces travaux permettront d’estimer l’impact des conditions de travail sur la santé mentale des travailleurs mais également de cibler les profils les plus à risque et d’identifier les leviers d’action efficaces à adapter aux nouvelles organisations de travail afin de lutter contre le stress au travail et le sentiment d’isolement.

La plateforme « Les Employeurs pour la Santé »

Santé publique France a lancé en mai 2022 la plateforme « Les Employeurs pour la Santé », un dispositif inédit pour accompagner les structures (publiques, privées et associatives) dans une démarche de prévention et de promotion de la santé de leurs collaborateurs. Le milieu du travail est un milieu favorable au développement d’actions de prévention et de promotion de la santé au bénéfice des salariés, et les employeurs peuvent ainsi jouer un rôle décisif pour la santé de leurs collaborateurs. Du fait du temps passé au travail par les salariés, le lieu de travail constitue une véritable opportunité pour promouvoir des comportements favorables à la santé comme par exemple, l’arrêt du tabac, l’activité physique, la rupture de sédentarité, une alimentation équilibrée, et ouvre diverses opportunités selon les secteurs.

La première thématique traitée concerne l’arrêt du tabac, et la plateforme « Les Employeurs pour la Santé » met à disposition des employeurs des outils adaptés pour déployer au sein de leur structure une politique de prévention et de promotion de la santé, au rythme qui leur convient. Il s’agit d’inciter et d’aider les employeurs à construire leur stratégie en vue d’améliorer la santé et le bien-être de leurs collaborateurs et de les guider à toutes les étapes de sa mise en place en facilitant l’accès à tous les documents (affiches, dépliants, vidéos) développés par Santé publique France. 
Cette plateforme a vocation à traiter de toutes les thématiques liées aux addictions et à l’ensemble des thématiques de prévention et de promotion de la santé dans les années à venir (alimentation, activité physique, santé mentale…).