Cas groupés de cancers pédiatriques communes de Loire-Atlantique

Mis à jour le 17 novembre 2022

Rappel du contexte et chronologie des actions

Entre 2015 et 2019, plusieurs cancers pédiatriques ont été signalés sur le secteur de plusieurs communes : Sainte-Pazanne, St-Hilaire-de-Chaléons, St-Mars-de-Coutais et Rouans. Suite à ces signalements, l’Agence régionale de santé Pays de la Loire a saisi Santé publique France. 

Une première enquête a été menée en 2017 par les autorités sanitaires, confirmant un excès de leucémies diagnostiquées sur une période de 2 ans chez les enfants de moins de 15 ans, par rapport aux cas attendus. L’analyse des facteurs de risque environnementaux avait identifié 4 pistes potentielles qui n’avaient pu être exclues et n’avait pas conclu à une cause commune aux cas signalés.

Suite au signalement en février 2019 de trois cas de cancers supplémentaires (un enfant et 2 jeunes adultes) dont un sur le secteur de Sainte-Pazanne (44), l’ARS Pays de la Loire a saisi Santé publique France le 28 mars 2019 pour mener des investigations au regard des nouveaux signalements.

Parallèlement, un Collectif a été créé à l’initiative de parents. Il réunit 30 personnes vivant sur les quatre communes concernées par les cancers pédiatriques.

Mise en place d’un comité de suivi et d’un comité technique

Un comité de suivi a été constitué à Nantes en mai 2019 par l’ARS Pays de Loire en lien avec Santé publique France, afin de partager les informations sur les études et les actions menées par les différents opérateurs. Ce comité réunit les professionnels de l’ARS, de Santé publique France et des autres services déconcentrés de l’Etat concernés (Préfecture, Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL)), les élus locaux, les représentants scolaires, des professionnels de santé, des représentants du Collectif et d’une association de riverains. L’ARS et Santé publique France mettent en œuvre des temps d’échange et de dialogue avec la société civile via ce comité de suivi, mais aussi par l’intermédiaire de réunions publiques. Ce comité est présidé par le Professeur Jacques Dubin, cancérologue, chirurgien maxillo-facial et ORL.

Pour répondre à la saisine et concevoir ses enquêtes, Santé publique France a mis en place un comité technique réunissant l’ensemble des expertises de l’agence. Elle s’appuie également sur des experts extérieurs à l’Agence,  du service d’onco-pédiatre du CHU de Nantes, du Registre des tumeurs de Loire-Atlantique et Vendée et du Registre national des cancers de l’enfant (Inserm).

Le point sur les différentes enquêtes et étude lancées par Santé publique France : 

En 2019 :

  • Une investigation épidémiologique pour identifier une possible source d’exposition locale commune à ces cancers d’enfant signalés.
  • Une enquête de contexte local pour identifier l’ensemble des préoccupations et questionnements des différentes parties prenantes ainsi que les actions développées par ces acteurs. L’ARS Pays de Loire a par ailleurs mené des investigations environnementales destinées à rapidement « lever des doutes » sur certaines expositions à partir d’un cahier des charges élaboré avec Santé publique France. A cette fin, Santé publique France s’est assuré l’attache d’experts extérieurs à l’Agence afin d’intégrer en vue de cette levée de doute l’ensemble des nuisances. L’ARS a quant à elle pris l’attache de l’IRSN sur la question des expositions au radon. 
  • En savoir plus : https://www.pays-de-la-loire.ars.sante.fr/questions-reponses-investigations-sur-lexces-de-cas-de-cancers-pediatriques-sur-le-secteur-de 

En 2020 : 

A la demande des parties prenantes, Santé publique France en lien avec le registre de Loire-Atlantique et Vendée a réalisé : 

  • ​une étude de la distribution géographique des cancers pédiatriques en Loire-Atlantique entre 2005 et 2018 mettant en perspective la situation sur ce secteur de 7 communes retenu avec le reste du département. L’analyse statistique a conclu à l’absence d’un risque anormalement élevé de cancers pédiatriques sur le secteur de Sainte-Pazanne par rapport au reste du département. Pour aller plus loin, une analyse par balayage spatio-temporel n’a pas montré la présence significative et persistante de regroupement de cancers de l’enfant sur le département.
  • En complément, l’étude épidémiologique n’a pas mis en évidence de cause commune pouvant expliquer le ce regroupement de cancers pédiatriques sur ce secteur.

Au vu des conclusions des différentes études, Santé publique France a mis un terme à l’investigation épidémiologique. Une surveillance est maintenue sur le secteur avec la collaboration des CHU de Nantes et d’Angers et des registres pour suivre la situation épidémiologique sur la durée. Cette surveillance repose sur le recensement exhaustif et précoce de tout nouvel enfant atteint de cancer diagnostiqué sur le périmètre de l’investigation. 

Où en est-on aujourd’hui ?

Après deux années de surveillance sur le secteur, Santé publique France publie un point de situation épidémiologique, dont les résultats montrent que : 

  • Au 1er octobre 2022, 19 enfants de moins de 18 ans ont été diagnostiqués sur le secteur des 7 communes (Machecoul-Saint-Même, Port-Saint-Père, Sainte-Pazanne, Rouans, Saint-Hilaire-de-Chaléons, Saint-Mars-de -Coutais, Villeneuve-en-Retz) entre 2015 et septembre 2022. La date du diagnostic du dernier cas notifié remonte à juillet 2021 ;
  • La situation locale est considérée comme globalement stable d’un point de vue épidémiologique par rapport aux conclusions de l’investigation de 2019-2020 ;
  • La poursuite de cette surveillance renforcée, initialement prévue pour 3 ans, sera évaluée en fin d’année 2023.

Santé publique France poursuit sa contribution à la recherche : un état des lieux non exhaustif des travaux en cours sur les liens entre facteurs environnementaux et cancers pédiatriques en France est présenté dans le document ainsi qu’une synthèse de l’état des connaissances sur les facteurs de risque des cancers pédiatriques (rédigé par le Registre national des cancers pédiatriques). 

A télécharger

Suspicion d’un regroupement de cancers pédiatriques en Loire-Atlantique. Point au 5 octobre 2022.

En savoir plus

Connaissance sur les facteurs de risque des cancers pédiatriques et travaux de recherche (Source : Jacqueline Clavel, Brigitte Lacour de l’équipe INSERM de recherche d'Epidémiologie des cancers de l'enfant et de l'adolescent - RNCE) 

A l'heure actuelle, aucune exposition environnementale n'a été établie comme facteur de risque des cancers de l'enfant en situation « normale ». Contrairement aux cancers de l'adulte, très peu de carcinomes se développent chez l'enfant, et les nombreux facteurs de risque environnementaux établis chez l'adulte en milieu professionnel et dans les habitudes de vie ne concernent pas l'enfant. 
Les radiations ionisantes sont des facteurs de risque reconnus dans un contexte environnemental en situation de catastrophe. Elles sont ainsi à l'origine de cancers de la thyroïde chez les riverains ukrainiens et biélorusses de l'accident de Tchernobyl, et de tous types de cancers chez les survivants des bombardements d'Hiroshima et Nagasaki. Le virus d'Epstein Barr est un facteur de risque prouvé de cancer nasopharyngé, de lymphome de Hodgkin et de lymphome de Burkitt. Dans ce dernier cas, dans l'environnement subsaharien favorable à l'anophèle, le paludisme joue un rôle de cofacteur.

Beaucoup de données ont été réunies sur d'autres expositions environnementales, sans pour autant parvenir à des conclusions fermes. La rareté et la diversité des cancers de l'enfant, la nécessité de disposer de contrastes d'exposition importants pour voir apparaître des différences de risque entre enfants exposés et non exposés, la difficulté de retracer l'historique des expositions depuis la vie intra utérine et l'absence de marqueurs d'exposition persistants au moment du diagnostic de cancer compliquent la recherche de facteurs de risque et obligent à travailler à l'échelle nationale ou internationale. Les 30 dernières années ont été productives et ont permis de documenter plusieurs hypothèses :

  • Le rôle des radiations ionisantes, aux doses faibles, issues des expositions d'origine naturelle (radon et rayonnement gamma tellurique), est très discuté. Aucun excès de risque de leucémie n'a été observé en France sur 30 années d'observation, mais un doute persiste dans certains pays. Il est beaucoup plus difficile d'étudier le risque de tumeurs cérébrales et a fortiori d'autres tumeurs solides du fait que ce sont des tumeurs très variées, très hétérogènes, avec de faibles effectifs. Néanmoins, si l'on a encore des difficultés à écarter la possibilité de tout risque de cancer lié à ces expositions environnementales, les données actuelles permettent de dire qu'un tel risque, s'il existe, ne peut être que très modéré ; 
  • Les expositions résidentielles aux pesticides, en particulier pendant la grossesse, sont associées à une augmentation du risque de leucémie et de tumeur cérébrale de l'enfant dans de nombreuses études. Cette augmentation, de l'ordre de 50%, n'est toutefois pas établie avec certitude, les données reposant pour la plupart sur la mémoire de parents d'enfants malades et non malades. La recherche de marqueurs biologiques d’exposition persistants sur plusieurs années, ou de tout autre indicateur objectif d'exposition permettrait d'avancer sur le rôle de ces expositions fréquentes ; 
  • Les expositions au trafic automobile et à la pollution de l'air ont été un peu moins étudiées. Les données actuelles suggèrent une augmentation du risque de leucémie chez les enfants les plus exposés, qui doit être confirmée et précisée. Les données sont beaucoup plus limitées et hétérogènes sur les tumeurs du système nerveux central et très insuffisantes sur les autres types de cancer ; 
  • Les expositions aux champs magnétiques à extrêmement basse fréquence générées par les lignes à haute tension ont été incriminées devant l'observation d'un risque plus élevé de leucémie chez les enfants vivant au voisinage immédiat des lignes de très haut voltage. Les données épidémiologiques récentes sont beaucoup moins en faveur de cette association qui n'a, par ailleurs, aucun substratum biologique. 

Des facteurs liés au mode de vie, sans pour autant relever de l'environnement proprement dit, ont été souvent associés au risque de cancer chez l'enfant. Ainsi, la consommation paternelle de tabac avant la conception augmenterait le risque de leucémie. A l'inverse, certains facteurs comme l'allaitement prolongé, la supplémentation maternelle préconceptionnelle en acide folique et, pour les leucémies, les infections banales précoces et la garde en crèche, pourraient avoir un rôle protecteur. 

Beaucoup de questions demeurent, elles font l'objet d'une recherche française https://rnce.inserm.fr/, https://programme-pediac.com/ et internationale https://www.clic.ngo/ très active.

Voir aussi

article

Questions-réponses des cancers pédiatriques à Sainte-Pazanne

bulletin régional

Regroupement de cancers pédiatriques dans plusieurs communes de Loire-Atlantique. Point au 29 novembre 2019.

vignette-questionnaire

Questionnaire Familles