Questions-réponses des cancers pédiatriques à Sainte-Pazanne

Publié le 10 octobre 2019

Les cancers pédiatriques

Quel est le nombre de cancers pédiatriques en France ?

On compte environ 1700 nouveaux cas de cancers pédiatriques de moins de 15 ans chaque année en France métropolitaine.

Quel sont les cancers pédiatriques les plus fréquents ?

Les cancers les plus fréquents sont les leucémies (28 %), les tumeurs du système nerveux central (24%) et les lymphomes (11%).

Quelles sont les causes des cancers pédiatriques ?

D’une manière générale, les causes des cancers d’enfants sont aujourd’hui encore très mal connues et les scientifiques disposent essentiellement d’hypothèses génétiques, immuno-infectieuses ou environnementales. En l’état actuel des connaissances, les causes des cancers pédiatriques sont très probablement plurifactorielles.

Les facteurs de risque dont le niveau de preuve est élevé sont :

  • les rayonnements ionisants médicaux à visée thérapeutique et ceux liés à des explosions atomiques, impliqués dans la survenue de plusieurs types de cancer ;
  • les prédispositions génétiques (maladies prédisposantes ou susceptibilité génétique), dans la leucémie aigue lymphoblastique ; 
  • le virus Epstein Barr (EBV) dans le lymphome de Burkitt.

D’autres facteurs sont débattus dans la littérature scientifique,  avec un niveau de preuve scientifique encore insuffisant à ce jour pour conclure en terme de causalité. Les principaux sont décrits ci-dessous :

  • des facteurs individuels : le poids à la naissance, le recours à une aide médicale à la procréation, mais également le tabagisme parental et la consommation de certains aliments à forte dose (thé et café) ;
  • des facteurs infectieux : l’exposition aux virus EBV et à l’herpès virus pour la leucémie ;
  • des expositions médicamenteuses : Antirétroviraux, Anticancéreux, contraception orale pour plusieurs types de cancers ;
  • l’exposition à des facteurs environnementaux : Physiques : les  lignes à haute tension (leucémie) ; les ultraviolets (leucémie aigue lymphoblastique) ; Chimiques : la pollution atmosphérique liée au trafic routier et notamment le benzène (leucémie) ; les Polychlorobiphényle (leucémie) ; les solvants et hydrocarbures lors d’exposition professionnelle du père ; les pesticides (hémopathies, tumeurs du système nerveux central, voire tumeurs embryonnaires), en exposition domestique ou du fait de l’exposition professionnelle des parents.
  • Le brassage de population, qui correspond à l’hypothèse immuno-infectieuse, fait également l’objet de publications pour expliquer des augmentations d’incidence de la leucémie infantile après l’afflux de population dans un territoire préalablement isolé. Enfin, des facteurs protecteurs sont également évoqués par certains auteurs, comme l’allaitement ; le contact précoce avec des agents infectieux ; la qualité de l’alimentation maternelle ou de l’enfant en termes de fruits et légumes et vitamines ;

La surveillance des cancers pédiatriques

Pourquoi existe-t-il une surveillance spécifique des cancers pédiatriques ?

Cette surveillance a été mise en place notamment dans le contexte d’investigations de regroupements de cas de cancers pédiatriques : leucémies autour de la Hague pour le début du registre des hémopathies de l’enfant (1990), et cancers dans l’école Franklin-Roosevelt à Vincennes pour le début du registre des cancers solides de l’enfant (2000). Ces deux registres ont fusionné en un seul (Registre National des Cancers de l’Enfant ou RNCE) et ont permis d’obtenir des données robustes et exhaustives sur le sujet, en réponse aux interrogations soulevées. Ils permettent aussi de faire des recherches pour améliorer les connaissances sur ces cancers, car elles peuvent se faire sur de plus grands nombres, à l’échelle nationale.

Comment est organisée la surveillance des cancers pédiatriques en France ?

En France, la surveillance des cancers de l’enfant et l’adolescent est assurée par le Registre National des Cancers de l’Enfant (RNCE) qui recense tous les cas de cancers des enfants de moins de 15 ans en France métropolitaine, depuis 1990 pour les hémopathies malignes et depuis 2000 pour les tumeurs solides. Depuis 2011, il a été étendu aux résidents des Départements d’Outre-Mer (Martinique, Guadeloupe, Guyane, Réunion) et aux adolescents de moins de 18 ans.

Qu’est-ce qu’un registre ?

Un registre est défini comme un recueil continu et exhaustif de données personnelles intéressant un ou plusieurs événements de santé dans une population géographiquement définie, à des fins de surveillance, de recherche ou d’évaluation, par une équipe ayant des compétences appropriées.

Que font les registres ?

Les registres :

  • participent à la surveillance sanitaire en produisant les taux de référence nationale sur l’incidence et la survie, et en étudiant les variations géographiques et temporelles de l’incidence.
  • surveillent l’incidence des cancers dans les populations considérées comme « à risque » : enfants ayant subi des traitements particuliers (antirétroviraux, radiothérapie…).Ils contribuent à l’investigation des agrégats de cas de cancers qui sont signalés dans un secteur géographique.
  • sont aussi un support pour les travaux de recherche sur les cancers menés au sein de l’équipe INSERM d’épidémiologie des cancers de l’enfant et de l’adolescent dirigée par J. Clavel (EPICEA, CRESS, UMR-S1153). Par exemple :
    • Le programme GEOCAP (Étude GEOlocalisée des CAncers Pédiatriques) dont l’objectif est d’étudier le rôle des expositions environnementales dans la survenue des cancers de l’enfant de moins de 15 ans (le trafic routier et l'exposition aux polluants émis, les lignes à haute tension et les champs électromagnétiques, la proximité de sites nucléaires, les rayonnements ionisants naturels, les UV…).
    • Les études ESCALE ou ESTELLE qui étudient l’influence sur le risque de cancer chez l'enfant, du déroulement de la grossesse, des caractéristiques de l’enfant à la naissance, de l’environnement de l’enfant in utero ou au cours de l’enfance, lié à la profession ou au mode de vie de ses parents, les prédispositions génétiques…
    • L’étude MOBI-KIDS recherche un lien entre l’exposition aux radiofréquences générées par les téléphones portables et la survenue d’une tumeur cérébrale chez les jeunes.

Les agrégats de cas de cancer

Qu’est-ce qu’un agrégat de cas de cancer ?

Un « agrégat spatio-temporel » ou « cluster » en anglais, est un regroupement de personnes ayant une même maladie ou les mêmes symptômes dans une zone géographique et dans un temps donné et dont le nombre rapporté à sa population est inhabituellement élevé.

Un tel regroupement peut survenir au sein d’une collectivité du fait de causes variées, et possiblement imbriquées, d’origine génétique, environnementale, infectieuse, professionnelle ou encore liées au mode de vie. Si aucune cause n’est identifiée, le rôle du hasard ne peut pas être exclu, du fait de la distribution statistique des cas dans le temps et dans l’espace et de la possibilité que le nombre de cas perçu comme anormal appartienne à cette distribution, et en soit simplement un élément extrême.

La mise en évidence d’un cluster soulève cependant la question, en santé publique, de l’existence d’une (ou plusieurs) cause (s) commune(s) qui explique(nt) le regroupement de cas de maladie dans le temps et dans l’espace.

La survenue d’agrégats de cancers pédiatriques en France est-elle fréquente ?

Concernant les clusters signalés à Santé publique France, ils sont assez fréquents (plusieurs/an), et font l’objet d’investigations systématiques en fonction du contexte et avec le concours du Registre national des cancers d’enfant pour recenser les cas validés.

Comment est traité un signalement d’agrégat de cancers ?

Les professionnels de santé ont développé un protocole spécifique pour l’étude des regroupements spatio-temporels de cas de maladie (cluster), qui est présenté dans un guide méthodologique disponible sur le site internet de Santé publique France. Ce protocole prévoit la collecte d’informations sur les problèmes de santé ayant fait l’objet d’un signalement et sur l’environnement dans lequel il est survenu.

Le principe scientifique directeur de l’investigation d’un signalement de cluster réside dans la notion que, s’il y a regroupement « anormal » de personnes atteintes d’une même maladie, elles devraient partager une exposition à une ou plusieurs cause(s) commune(s) et que cette situation d’exposition n’est pas retrouvée dans le reste de la population. Dès lors, les objectifs épidémiologiques de la réponse à une suspicion de cluster sont de déterminer :

  • s’il existe effectivement un excès de pathologies dans la population observée ;
  • et, si cet excès existe, de déterminer s’il existe une ou plusieurs causes locales à ce regroupement de cas, autres que le hasard.

L'étude épidémiologique dans le secteur de Sainte-Pazanne

A quoi sert l’étude épidémiologique ?

L’étude épidémiologique menée dans le cas présent par Santé publique France vise à identifier un ou des facteurs de risque, qui seraient communs aux enfants victimes de cancer localement et que l’on ne retrouverait pas ailleurs ou de façon générique.

Comment se déroule-t-elle ?

C’est une enquête descriptive réalisée à partir de questionnaires destinés aux familles ayant un enfant malade, faisant partie du regroupement de cas. Elle nécessite dans un premier temps de définir un périmètre pour l’étude et dans un second temps d’élaborer un questionnaire détaillé permettant de passer en revue les habitudes de vie des familles. L’ensemble de ces questionnaires est analysé par Santé publique France. Si les résultats orientent vers des facteurs communs locaux, l’Agence pourra préconiser des prélèvements environnementaux.

Quel est le périmètre choisi pour l’étude épidémiologique ?

Un périmètre tient compte de 3 paramètres : temps, lieu, personne. Sa détermination vise à se donner le maximum de « chance » d’identifier un ou des facteurs de risque communs aux cancers étudiés ou à faire émerger une hypothèse sur un facteur de risque jusqu’alors inconnu. Ainsi, un périmètre trop étroit empêche de comptabiliser toute l’information et un périmètre trop large risque de diluer la qualité de l’information quand on veut mettre en relation une exposition et la survenue de la maladie. Une fois fixé, le périmètre d’une étude ne peut plus être modifié, sous peine de fausser les résultats.

Dans le cas présent, le périmètre de l’étude  comprend :

  • les cancers pédiatriques, de toute nature et diagnostiqués entre 2015 et 2019, chez des mineurs âgés de moins de 18 ans au moment du diagnostic.
  • La zone géographique concerne 7 communes : SaintePazanne, Port-Saint-Père, Saint-Mars-de-Coutais, Machecoul-Saint-Même, Villeneuve-en-Retz, St-Hilaire-de-Chaléons et la commune de Rouans qui est à proximité de Sainte-Pazanne.

D’après les données validées par le registre des tumeurs de Loire-Atlantique et Vendée et le registre national de cancer de l’enfant, à la date du 10 octobre 2019, il concerne 13 enfants atteints de cancer, dont 3 sont aujourd’hui décédés.

A quoi sert le questionnaire dans le cadre de l’enquête ?

Dans le cadre de l’étude épidémiologique, le questionnaire adressé aux familles concernées va permettre de décrire l’environnement et les habitudes de vie des enfants atteints de cancer et rechercher une sur-exposition à un ou des facteurs de risque, évoqués dans la littérature scientifique dans la littérature, qui serait communs aux enfants.

Il a été élaboré à partir des connaissances scientifiques actuelles. Ce questionnaire permettra le recueil d’informations relatives à :

  • l’enfant : les éléments liés au diagnostic, à la maladie et sa prise en charge, les antécédents médicaux familiaux et personnels, des informations relatives aux lieux de résidence principale, secondaire et lieux de vacances, le mode de garde et la scolarité de l’enfant, les loisirs, les habitudes alimentaires…
  • la mère avant, pendant la grossesse et pendant l’allaitement si la personne est concernée : antécédents médicaux personnels, facteurs environnementaux, facteurs médicaux, habitudes de vie…
  • le père : antécédents médicaux personnels, facteurs environnementaux et médicaux, habitudes de vie avant la conception de l’enfant…

Si des familles ayant un enfant avec un cancer hors du périmètre de l’étude souhaitent y répondre, est-ce possible ? Allez-vous tenir compte des réponses ?

La fixation du périmètre (temps, lieu, personnes) implique la recherche exhaustive de tous les cas de cancer inclus dans celui-ci. Pour mener l’étude avec la rigueur scientifique qui donne les meilleures chances de trouver des facteurs communs pouvant expliquer un excès de cancers pédiatriques,  le périmètre de l’étude ne peut évoluer au cours du temps, ce qui fausserait les résultats.
Le questionnaire est spécifique au contexte de la zone géographique retenue de l’étude épidémiologique.
Ainsi, l’analyse du questionnaire se restreindra aux familles retenues dans le périmètre de l’étude.
Néanmoins, ce document a été également administré à 3 familles hors le périmètre de l’étude (2 hors périmètre pour des critères d’âge mais habitant dans le secteur et 1 mineur hors périmètre géographique). Si une exposition commune aux enfants est identifiée parmi eux, l’information pourrait être recherchée dans les 3 questionnaires concernés.

L'étude de contexte local

Qu’est-ce qu’une étude de contexte local ?

Santé publique France réalise une étude sur les attentes et questionnements des acteurs locaux. Elle est complémentaire des échanges se développant dans le comité de suivi et des informations fournies par ailleurs par les parties prenantes. L’étude a comme objectif de recueillir les inquiétudes, questionnements, attentes, savoirs et actions mises en œuvre par les parties prenantes locales et les éventuels décalages de points de vue afin de fournir des éléments de réponse adaptés aux parties prenantes locales.  

Ce type d’enquête qualitative ne vise pas à obtenir une représentativité statistique des points de vue mais cherche, en fonction du nombre et du choix des interlocuteurs, à saisir les positions des acteurs locaux impliqués sur différents points.

L’enquête s’est déroulée par entretiens individuels semi-directifs en face-à-face ou petits groupes (5 personnes au maximum) auprès des parties-prenantes sélectionnées en s’appuyant sur un questionnaire

Quelles sont les personnes interrogées ?

Une vingtaine d’entretiens, permettant de rencontrer 30 personnes a été menée : des responsables et membres d’associations locales et du collectif « Stop aux cancers de nos enfants », des parents d’enfants atteints d’un cancer, des élus locaux, des représentants du milieu scolaire, des professionnels de santé, des experts de la surveillance des cancers et des riverains des villes concernées.

La démarche participative

Qu’est-ce que le comité de suivi ?

Le comité de suivi, qui se réunit à l’Agence Régionale de Santé Pays de la Loire (ARS) à Nantes, rassemble l’ensemble des parties-prenantes : les professionnels de l’ARS, de Santé publique France et des autres services déconcentrés de l’Etat concernés (Préfecture, Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL)), les élus locaux (maires et députés), les représentants scolaires (Education nationale, Uradel -enseignement privé), des professionnels de santé (médecins généralistes, infirmières, PMI, etc.), des représentants du Collectif « Stop aux cancers de nos enfants » et d’une association de riverains.

Ce comité est présidé par le Professeur Jacques Dubin, cancérologue, chirurgien maxillo-facial et ORL. Il a notamment exercé au CHU Angers. Ancien président du Conseil départemental de l'ordre des médecins, il a participé à l’espace régional d’éthique. Il est aussi membre du conseil d'administration de la Ligue contre le cancer du Maine-et-Loire et membre de la commission des usagers de la Conférence régionale santé et autonomie en Pays de la Loire. Son rôle de président consiste à animer de façon impartiale le dialogue entre experts, autorités sanitaires et parties prenantes.

Quel est son objectif ?

Le comité de suivi a été créé dans l’objectif d’avoir un espace d’échange et d’information avec chacun. Il est organisé régulièrement pour informer les parties prenantes de l’avancée des travaux de répondre aux questions que ces travaux peuvent susciter et de débattre de propositions formulées par les différents membres.
Les dates des derniers comités : 21 mai, 26 juin et 29 août.

Les prélèvements environnementaux

Quels contrôles ont été effectués à ce jour ?

En marge de l’investigation épidémiologique, des contrôles environnementaux destinés à rapidement « lever des doutes » sur certaines expositions environnementales (repérer d’éventuels dépassements de norme réglementaire ou valeur guide) et à prendre si nécessaire des mesures de protection ont été menés par l’ARS avec différents opérateurs. Cette levée de doute a été réalisée dans un premier temps au niveau de l’Ecole Notre Dame de Lourdes, située à proximité d’un ancien site industriel du fait que plusieurs cas avaient fréquentés cette école. Les investigations ont porté pendant l’été 2019 dans l’environnement du site industriel et au sein de l’école. Plus de 150 prélèvements ont ainsi été réalisés. Les premiers résultats ont été présentés à l’occasion du comité de suivi du 29 août 2019 et aux parents d’élèves et aux enseignants de l’école lors d’une réunion dédiée à Ste Pazanne le 11 septembre 2019. Ils sont publiés sur le site de l’ARS Pays de la Loire.
Si à l’issue de l’enquête épidémiologique il apparait d’autres hypothèses en rapport avec une exposition environnementale commune alors des investigations complémentaires pourront être proposées.

Pour en savoir plus : https://www.pays-de-la-loire.ars.sante.fr/investigations-sur-lexces-de-cas-de-cancers-pediatriques-sur-le-secteur-de-ste-pazanne