Évolution de la perte auditive due au bruit professionnel à partir de l’exploitation d’audiométries dans une population de travailleurs de 1970 à 2000 en région Rhône-Alpes

Publié le 12 mai 2025
Mis à jour le 13 mai 2025

Introduction – En France, la surdité professionnelle est la 5e cause de maladie professionnelle la plus reconnue par le régime général de la sécurité sociale en 2022. De 1970 à 2000, l'Institut universitaire de médecine du travail de Lyon a mené des campagnes d'examens audiométriques dans des entreprises de la région Rhône-Alpes afin d'évaluer l'impact des nuisances sonores sur l'audition des travailleurs. L'exploitation de ces données a pour objectif d'évaluer l'évolution de la perte auditive moyenne de cette population sur cette période. Matériel et méthodes – La base de données utilisée comporte 49 600 examens audiométriques. Des critères de sélection sur l'âge, l'ancienneté dans l'emploi et l'absence de pathologies de l'oreille ont été retenus et 8 270 audiogrammes ont finalement été analysés. Une perte auditive moyenne et son intervalle de confiance à 95% (IC95%) en dB ont été calculés à partir des fréquences utilisées pour la déclaration en maladie professionnelle (500, 1 000, 2 000 et 4 000 Hz pour les deux oreilles). Les prévalences de la perte auditive d'au moins 20 dB et de la perte auditive invalidante (≥35 dB) ont également été calculées à partir de la moyenne des pertes audiométriques pour ces mêmes fréquences sur la meilleure oreille. Les pertes auditives moyennes et les prévalences ont été calculées selon le sexe, la profession (d'après la nomenclature des professions et catégories socioprofessionnelles de 2003) et le secteur d'activité (d'après la nomenclature d'activités française de 2008) et déclinées sur trois périodes distinctes : 1970-1979, 1980-1989 et 1990-2000. Résultats – La population est constituée majoritairement d'hommes (85,1%) dont l'âge moyen est de 39,2 ans (IC95%: [39,0-39,4]) et l'ancienneté dans l'emploi moyenne de 14,4 ans [14,2-14,6]. Bien que la différence soit statistiquement significative, l'âge moyen et l'ancienneté moyenne sont des valeurs proches au cours des trois périodes. On constate une diminution significative de la perte auditive moyenne chez les hommes au cours de la période étudiée, de 21,5 dB [21,1-21,9] en 1970-1979 à 14,5 dB [13,7-15,2] en 1990-2000. Entre 1970 et 2000, un tiers des hommes présentaient une perte auditive d'au moins 20 dB (34,4%) et la prévalence de la perte auditive invalidante (≥35 dB) était de 6,1%. Conclusion – L'étude de mesures audiométriques réalisées sur une longue période historique a permis de documenter l'évolution de la perte auditive moyenne au sein de plusieurs groupes professionnels de salariés exposés au bruit. La baisse constatée dans cette population est à mettre en parallèle avec les actions engagées par le droit français et européen depuis 1970 visant à l'amélioration des conditions de travail.

Auteur : Fort Emmanuel, Delabre Laurène, Pelletan Jean-Baptiste, Duvignau Alexandra, Massardier-Pilonchéry Amélie, Pilorget Corinne
Bulletin épidémiologique hebdomadaire, 2025, n°. 9, p. 136-149