Suivi épidémiologique de la population vivant dans la zone exposée à l’incendie industriel des entrepôts de Lubrizol et NL Logistique

Santé publique France a mis en place un suivi épidémiologique de la population générale vivant dans la zone exposée à l’incendie industriel survenu le 26 septembre 2019 sur les sites des entreprises Lubrizol et NL Logistique à Rouen. 

Mis à jour le 14 septembre 2023
Dans cet article

Le 26 septembre 2019, un incendie industriel s’est déclaré dans les entrepôts des entreprises Lubrizol et NL Logistique, situés dans la zone portuaire de Rouen et a pu exposé la population à différents facteurs de risque sanitaire (exposition aux fumées, retombées, odeur, stress). 

Santé publique France a été missionnée par la Direction générale de la santé pour évaluer l’impact sur la santé physique et mentale, des personnes qui ont pu être exposées à un ou plusieurs de ces facteurs de risque sanitaire. La description et l’analyse de leurs perceptions de l’événement, de leurs expositions et des symptômes ressentis, la mesure et la surveillance d’indicateurs de l’état de santé de la population, doit permettre aux autorités publiques de prendre des mesures sanitaires si elles sont nécessaires et d’adapter au mieux la gestion d’autres accidents industriels. 

Dans ce cadre, un ensemble d’études épidémiologiques sont mises en place pour évaluer l’impact sanitaire de l’incendie : le dispositif « Santé post-incendie-76 ». Ce dispositif comprend une surveillance épidémiologique de la population résidant dans la zone exposée à partir des données du Système national des données de santé (SNDS).

Objectifs

  • Décrire et suivre l’évolution temporelle de la fréquence d’évènements de santé au sein de la zone exposée à l’incendie industriel ;
  • La comparer à celle de zones non exposées et à la période avant l’incendie pour identifier une éventuelle différence de fréquence. 

Ce suivi permettra d’éclairer la décision publique dans la mise en place de mesures de prise en charge des populations concernées et de prévention dans le cadre d’autres accidents industriels.

Population étudiée

Le suivi concerne les personnes résidant dans la zone d’étude, à savoir : 

  • une zone exposée à l’incendie ou à ses conséquences, comprenant 119 communes de Seine-Maritime, découpée en sous-zones définies dans l’enquête de santé en fonction des types d’exposition (odeur, fumée, dépôt...) ;
  • deux zones non exposées prises comme référence située autour des villes du Havre et de Caen.
Zone exposée / non exposée à l'incendie de Rouen
Zone exposée / non exposée à l'incendie de Rouen

Déroulement de l’étude

Périodes d’étude

La période d’étude couvre une période de référence de trois années avant l’incendie et une période post-incendie de durée variable selon l’indicateur sanitaire, allant d’un mois (maladies cardiovasculaires) à plusieurs années (pour les cancers).

Méthodologie

L’étude s’appuie sur l’analyse des données de remboursements de soins issues du Système national des données de santé (SNDS). La survenue de nombreux évènements de santé de type cardiovasculaire, respiratoire, santé mentale ou de périnatalité, sont suivi à travers ces données. Ces évènements de santé seront identifiés à l’aide d’indicateurs de santé comme les recours aux soins, hospitalisation, délivrance de médicaments. 

Les évènements de santé ont été sélectionnés sur la base :

  • d’une revue de la littérature, 
  • des résultats de l’enquête de santé déclarée, 
  • des polluants émis,
  • et des attentes locales.   

Les fréquences de survenue de ces évènements de santé par unité de temps (par semaine, mois ou année), sur la période post-incendie, sont calculées et comparées à celles observées sur la période de référence et dans les zones non exposées. Ceci permet de tenir compte des fréquences de survenue déjà observées avant l’incendie et des évolutions temporelles observées sur des territoires qui n’ont pas été exposés à l’incendie. Les analyses sont réalisées sur l’ensemble de la zone exposée et les quatre sous-zones selon les effectifs.  

A télécharger

Surveillance épidémiologique de la population vivant dans le territoire exposé à l’incendie industriel de Rouen du 26 septembre 2019. P...

En savoir plus

Le SNDS est une base de données médico-administrative. Il centralise les données des hospitalisations, des recours au système de soins (consultations, pharmacie…) ayant fait l'objet d'un remboursement par l'Assurance Maladie, quel que soit le régime d'assurance maladie. Il centralise également les informations des affections longues durées et des causes médicales de décès.  Ces données, transmises sans l’identité des personnes, permettent à de nombreux chercheurs et organismes publics, dont Santé publique France, d’étudier et suivre la santé de la population française. 

Quand et comment seront disponibles les résultats ?

Les résultats seront publiés et restitués aux parties prenantes par famille d’évènements de santé (santé cardiovasculaire, respiratoire, santé mentale…) à partir de 2023, selon la temporalité de suivi (court, moyen et long terme) défini dans le protocole. Pour les indicateurs surveillés sur plusieurs années, des restitutions à intervalles réguliers seront réalisées.

L’ensemble des résultats seront disponibles sur le site Internet de Santé publique France et pourront également être valorisés par des articles scientifiques.

Premiers résultats : étude des délivrances de médicaments psychotropes  

Les premières analyses réalisées concernent les délivrances de traitements par médicaments psychotropes (anxiolytiques, hypnotiques et antidépresseurs) en tant qu’indicateur de l’état de santé mentale de la population. Ces résultats complètent ceux de l’étude de santé et de qualité de vie qui montraient une altération de la santé mentale un an après l’incendie. 

Par ailleurs, les délivrances de médicaments psychotropes, à partir des données du SNDS, ont également été croisées avec les données de l’enquête de santé perçue et de qualité de vie, permettant de prendre en compte différents facteurs (réponses aux questionnaires, expositions déclarées, facteurs individuels) et analyser plus précisément la zone de proximité. Les résultats de ces deux études ne montrent pas de différence dans l’évolution de délivrance ou d’instauration de traitement par médicaments psychotropes après le 26 septembre 2019 entre la zone exposée à l’incendie et les zones non exposées, y compris parmi les personnes résidant à proximité (chez les répondants et non répondants), et quelle que soit l’exposition ou les symptômes ressentis (chez les répondants uniquement).

Confidentialité et sécurité des données

Les données du SNDS utilisées sont pseudonymisées1. Santé publique France traite ces données au sein d’un espace spécifique du portail du SNDS de la Cnam. Seules des données agrégées non identifiantes sont extraites du portail.

Comitologie et financement 

L’étude s’appuie sur un comité d’appui thématique indépendant intitulé : « Evaluation de l’impact de l’incendie des entreprises Lubrizol et NL Logistique sur la santé de la population » en place pour appuyer Santé publique France dans le cadre de SPI 76.  Il est constitué de personnes externes à Santé publique France et qualifiées dans les domaines de la toxicologie, la santé mentale. Il a pour rôle d’aider aux choix scientifiques, à l’interprétation des résultats et à la formulation de propositions et actions de santé publique issues des travaux menés.

Ce suivi est financé par un autofinancement de Santé publique France.

1 La pseudonymisation est un procédé qui consiste à remplacer les données directement identifiantes (nom, prénoms, etc.) d’un jeu de données par des données indirectement identifiantes (alias, numéro séquentiel, etc.). Il permet ainsi de traiter les données d’individus sans pouvoir les identifier (en savoir plus sur le site internet de la Cnil).