Objectifs : La surveillance des maladies infectieuses transmissibles implique des collaborations étroites entre cliniciens, épidémiologistes et biologistes pour prévenir tout risque épidémique, notamment à partir de l'apparition ou d'une incidence inhabituelle de variants antigéniques. Les infections méningococciques représentent des urgences médicales à la fois par leur évolutivité potentiellement létale pour le patient et par leur contagiosité. L'exemple de l'apparition soudaine de cas groupés d'infections à Neisseria meningitidis du sérogroupe peu fréquent W135 chez des pèlerins de retour de La Mecque et chez leurs proches en mars 2000 illustre l'importance de la mise en oeuvre de procédures d'alerte et de contrôle selon des approches multidisciplinaires. Méthodes : Les infections systémiques à N. meningitidis sont des maladies à déclaration obligatoire. Les souches bactériennes sont identifiées et sérogroupées par les différents laboratoires de biologie clinique, puis adressées au Centre National de Référence des Méningocoques (CNRM) pour confirmation, et typages antigéniques complets. En cas d'échec de la culture, le diagnostic étiologique peut être obtenu par amplification génique directement à partir des prélèvements de liquide céphalorachidien de sang, de liquide de ponction synoviale ou péricardique, de biopsie cutanée, etc. Lorsque surviennent des cas groupés, le CNRM et le Centre Collaborateur de l'Organisation mondiale de la Santé réalisent des typages moléculaires exhaustifs. Toute suspicion d'épidémie fait l'objet d'une alerte auprès du Bureau de la Veille Sanitaire de la Direction Générale de la Santé (DGS) et auprès de l'Institut de Veille Sanitaire (InVS). Résultats Vingt sept cas d'infections systémiques à N. meningitidis du sérogroupe W135, du sérotype 2a, du séro-sous-type P1-2,5 ont été diagnostiqués entre le 22 mars et le 20 novembre 2000. Le typage moléculaire des souches a montré qu'il s'agissait d'un clone unique apparenté au complexe clonal ET-37. La dissémination d'un clone de N. meningitidis W135, en relation avec le retour de voyage de pèlerins de La Mecque vaccinés contre les méningocoques des sérogroupes A et C, faisait craindre la sélection d'un nouveau génotype par altération des gènes de la capsule. Cependant, des souches du méningocoque de la formule W135 :2a :P1.2,5 et qui sont apparentées au complexe clonal ET-37 sont isolées en France depuis 1994. Conclusion : La dispersion mondiale de ce clone fait craindre l'apparition d'épidémies, notamment en Afrique, et des mesures vaccinales nouvelles seront à mettre en place.
Auteur : Taha MK, Antignac A, Renault P, Perrocheau A, Levy Bruhl D, Nicolas P, Alonso JM
La Presse médicale, 2001, vol. 30, n°. 31, p. 1535-8