Imprégnation de la population française par les polychlorobiphenyles, dioxines et furanes. Programme national de biosurveillance, Esteban 2014-2016

Publié le 16 décembre 2021
Mis à jour le 8 février 2024

Les polychlorobiphényles (PCB), les polychlorodibenzodioxines (PCDD) et les polychlorodibenzo-furanes (PCDF), font partie de la famille des polluants organiques persistants (POPs). Ils sont lipophiles, bioaccumulables et très stables dans l'environnement. Les PCB sont constitués des PCB-non dioxin-like (PCB-NDL) et des PCB-dioxin-like (PCB-DL). Ils ont principalement été utilisés dans les transformateurs et les condensateurs à partir des années 1930, puis leur utilisation a été progressivement légiférée de 1987 à 2013. Les PCDD/F sont principalement formés au cours de processus thermiques tels que l'incinération des déchets, les activités industrielles ou les processus accidentels. Leurs émissions atmosphériques ont été réglementés en 2002 puis en 2010. Les PCB et PCDD/F ont des propriétés toxiques avérées : les congénères PCB-DL et deux congénères PCDD/F ont été classés cancérigènes pour l'homme. Par ailleurs, l'exposition par les PCB et PCDD/F pourrait également avoir des effets sur la reproduction, le système endocrinien, immunologique et neurologique. Dans le cadre du programme national de biosurveillance, l'étude transversale Esteban (2014-2016) a permis de mesurer dans la population française continentale les niveaux d'imprégnation de 45 biomarqueurs PCB et de 17 biomarqueurs PCDD/F chez des adultes âgés de 18 à 74 ans (n=604). Les analyses ont été effectuées sur des prélèvements sanguins pour l'ensemble des biomarqueurs étudiés. En plus de la description des niveaux d'imprégnation des congénères PCB et PCDD/F, les déterminants de l'exposition aux différents groupes de biomarqueurs suivants ont été caractérisés : la somme (Σ) des PCB-NDL, la Σ PCB-DL, les PCB majeurs (ΣPCB 138+153+180), les PCB-indicateurs (6 PCB-NDL et 1 PCB-DL), la Σ PCDD, la Σ PCDF, la Σ PCDD/F et les dioxin-like (Σ PCB-DL + PCDD + PCDF). La quasi-totalité des PCB-NDL et des PCB-DL était quantifiée. Six congénères PCDD sur 7 étaient quantifiés à plus de 50 % et 4 congénères PCDF sur 10 étaient quantifiés à plus de 60 %. En population générale adulte, l'imprégnation par les PCB et les PCDD/F étaient plus faible dans l'étude Esteban que dans les études françaises précédentes. Les niveaux d'imprégnation par les PCB et PCDD/F mesurés dans l'étude Esteban, étaient équivalents ou plus élevés par rapport aux études étrangères réalisées à la même période. Les niveaux d'imprégnation par ces substances augmentaient avec l'âge. L'imprégnation par les substances dioxin-like (PCB+PCDD/F) augmentaient avec l'indice de masse corporelle. La consommation d'oeufs, de matières grasses et de produits d'origines animales auto-produits seraient des déterminants alimentaires d'exposition aux PCB et PCDD/F. Les consommateurs d'eau du robinet non filtrée semblaient plus imprégnés par les PCB-NDL, que les consommateurs d'eau embouteillée. Parmi les déterminants d'imprégnation par les PCDD/F, on retrouve également l'utilisation d'un barbecue, la faible aération domestique, l'absence de ventilation fonctionnelle dans la cuisine ou la salle de bain et l'utilisation fréquente de pesticides. L'étude Esteban nous permet donc de mettre en évidence une diminution de l'imprégnation par les PCB et PCDD/F, probablement liée à l'impact des législations visant à réguler la présence de ces molécules dans l'environnement. Cependant, la population est toujours exposée à ces substances en raison de leur stabilité chimique, de leur rémanence dans l'écosystème et de certaines émissions toujours actives. Diverses sources résiduelles qui échappent aujourd'hui encore à la réglementation, peuvent être à l'origine d'émissions de PCB et PCDD/F : certains déchets, le transport ou le secteur résidentiel (brûlage de déchets verts par exemple) et tertiaire. Ces sources contribuent à la contamination de l'ensemble de la chaîne trophique via le sol et l'eau, ce qui expose toujours à ce jour la population française, à travers la chaîne alimentaire. Les usages domestiques (utilisation d'un barbecue ou usage fréquent de pesticides) et la faible ventilation de l'air intérieur contribuent également à l'imprégnation par les PCB et PCDD/F. Compte tenu des impacts sanitaires avérés ou potentiels liés aux PCB et PCDD/F, des mesures de réductions des expositions seraient encore nécessaires afin de protéger les populations.

Auteur : Balestier Anita, Fillol Clémence, Gane Jessica, Oleko Amivi, Saoudi Abdessattar, Zeghnoun Abdelkrim
Année de publication : 2021
Pages : 148 p.
Collection : Études et enquêtes