Imprégnation de la population française par les pesticides organophosphorés. Programme national de biosurveillance, Esteban 2014-2016

Publié le 16 décembre 2021
Mis à jour le 15 décembre 2021

Dans le cadre du programme national de biosurveillance, l'étude transversale Esteban conduite en 2014-2016 a permis de mesurer les niveaux d'imprégnation par les pesticides organophosphorés dans la population française continentale, notamment pour la première fois chez les enfants âgés de 6 à 17 ans, et pour la seconde fois chez les adultes âgés de 18 à 74 ans. La mesure des concentrations urinaires des organophosphorés spécifiques a été réalisée sur un sous-échantillon constitué de 245 enfants et 754 adultes, et celle des organophosphorés non spécifiques a été réalisée sur un sous-échantillon constitué de 500 enfants et 899 adultes. Les pesticides organophosphorés spécifiques mesurés en population générale dans le cadre de l'étude Esteban étaient, soit très peu quantifiables (< 4 %) (chlorpyrifos, chlorpyrifos-oxon, chlorpyrifos méthyl, 3,5,6-trichloro-2-pyridinol TCPy, 4-nitrophénol), soit à 100 % non quantifiables (chlorpyrifos méthyl-oxon, parathion, parathion méthyl). Les métabolites dialkylphosphates (DEP, DETP, DEDTP, DMP et DMDTP) ont été chacun mesurés à des niveaux de concentration quantifiables chez moins de la moitié de l'échantillon, à l'exception du DMTP qui a été quantifié chez respectivement 92,6 % des enfants et 82,5 % des adultes. Le DMDTP et le DEDTP ont été très peu quantifiés à la fois chez les enfants et chez les adultes (< 3 %). La concentration urinaire moyenne (moyenne géométrique) du DMTP était de 4,01 µg.L-1 (4,06 µg.g-1 créatinine) chez les enfants et de 2,78 µg.L-1 (2,002 µg.g-1 créatinine) chez les adultes. Les résultats de l'étude Esteban montrent que les valeurs de référence d'exposition (VRE) des métabolites dialkylphosphates sont plus élevées chez les enfants comparés aux adultes, à l'exception du DEP qui présente chez les enfants une VRE de moitié, la VRE des adultes. Les distributions des concentrations des métabolites dialkylphosphates chez les adultes dans l'étude Esteban sont globalement moins élevées ou similaires à celles observées dans l'étude ENNS. La comparaison des niveaux d'imprégnation avec les études internationales reste limitée, compte tenu des faibles pourcentages de quantification des dialkylphosphates dans Esteban et des différences méthodologiques entre les études ou des différences dans les méthodes de report des résultats. L'analyse des déterminants de l'exposition n'a pas permis de mettre en évidence des sources d'exposition aux pesticides organophosphorés chez les enfants. Toutefois, les plus jeunes enfants avaient des concentrations en DMTP plus élevées que les enfants plus âgés. Chez les adultes, le fait de déclarer ne pas consommer, ou consommer moins d'une fois par mois, un aliment issu de l'agriculture biologique (produits laitiers, oeufs, volaille et autres viandes, fruits et légumes, céréales ou pain complet) était associé à une augmentation de la concentration moyenne urinaire en DMTP. La forte baisse des niveaux d'imprégnation par les métabolites dialkylphosphates en population française sur les dix dernières années pourrait résulter du déclin de l'usage des pesticides organophosphorés en France, substitués par les pyréthrinoïdes. Toutefois, il semble demeurer des sources d'exposition environnementale et alimentaire aux organophosphorés en population générale en France. Il est important de poursuivre le suivi des tendances temporelles de cette exposition dans la population, pour les substances encore détectées à ce jour.

Auteur : Tagne-Fotso Romuald, Fillol Clémence, Gane Jessica, Oleko Amivi, Saoudi Abdessattar, Zeghnoun Abdelkrim
Année de publication : 2021
Pages : 60 p.
Collection : Études et enquêtes