Covid-19 : données de surveillance, quels changements et pourquoi ?

Quelle est l’importance des points épidémiologiques hebdomadaires en phase 3 ? De nouveaux indicateurs de surveillance ont été intégrés : Pourquoi ? Quels sont ces indicateurs ? Vont-ils évoluer ?

Publié le 17 mars 2020

3 questions à Sophie Vaux, Coordonnateur de programme au sein de la Direction des Maladies Infectieuses à Santé publique France

Quelle est l’importance des points épidémiologiques hebdomadaires en phase 3 ?AfficherMasquer

Le point hebdomadaire est un point de situation sur l’épidémie de Coronavirus en France. Il reprend des indicateurs quotidiens mais également des indicateurs qui ne sont disponibles qu’à une fréquence hebdomadaire. Ce format permet d’aller plus loin dans les analyses, de développer et de mettre en perspective les différentes données produites, et ainsi de disposer d’une vision plus complète de l’épidémie en cours.

De nouveaux indicateurs de surveillance ont été intégrés : Pourquoi ?AfficherMasquer

La situation épidémiologique ayant complètement évolué, le point épidémiologique doit répondre à de nouveaux objectifs : comprendre comment se déroule l’épidémie ; surveiller les souches du virus circulant sur le territoire et contribuer à l’évaluation des mesures mises en place pour lutter contre le coronavirus.

Pour rappel, en phase 1, le dispositif de surveillance avait pour objectif d’identifier tous les cas COVID-19 en France et ceux survenus à l’étranger, et de répertorier et surveiller les personnes contact afin d’éviter la survenue transmissions secondaires.  En phase 2, l’objectif était d’identifier au plus vite les chaines de transmission afin de les casser et d’empêcher ou à défaut de retarder la diffusion du virus sur tout le territoire.

Nous sommes maintenant en phase 3, qui correspond à une circulation large du virus au sein de la population avec une augmentation rapide du nombre de cas, ne permettant plus d’assurer un décompte exhaustif et fiable du nombre de cas. Les dispositifs de surveillance mis en place en phases 1 et 2 ne sont donc plus adaptés à la phase 3. La surveillance a donc dû être adaptée ave la mise en œuvre de nouveaux indicateurs.  

Quels sont ces indicateurs ? Vont-ils évoluer ?AfficherMasquer

La surveillance est aujourd’hui « populationnelle » et s’appuie sur plusieurs indicateurs produits en collaboration avec de nombreux partenaires. Les objectifs de cette surveillance visent à décrire l’épidémie en termes de diffusion temporo-spatial, de gravité, d’identification des personnes à risque et d’estimation de son impact.

Nous avons ainsi des indicateurs en médecine ambulatoire (ou médecine de ville) permettant de suivre la tendance de l’épidémie et d’estimer le nombre de cas dans la population consultant un médecin. Pour se faire nous nous appuyons sur deux sources de données : le Réseau Sentinelles, réseau de médecins généralistes et de pédiatres et SOS Médecins.

Ces remontées de données permettent de suivre l’évolution de l’épidémie chez des patients à domicile ne nécessitant pas de prise en charge hospitalière.

Les médecins du Réseau Sentinelles comptabilisent ainsi les nombres de patients ayant consulté ou télé-consulté avec des signes cliniques compatibles avec une infection à COVID-19. Ils réalisent également des prélèvements chez certains de ces patients selon un protocole prédéfini, ce qui permet d’estimer, chaque semaine, un nombre de nouveaux cas COVID-19 ayant consulté un médecin généraliste.  Il est également suivi, le nombre d’actes médicaux SOS médecins pour suspicion de COVID-19.

En termes de surveillance virologique, les évolutions des taux de positivités des tests pour SARS-CoV-2 réalisés dans les établissements hospitaliers ainsi que dans les laboratoires de biologie médicale de ville permettent également de suivre la diffusion du virus.

Les infections à Covid-19 ont de très lourdes conséquences chez les personnes âgées. Une surveillance a ainsi été mise en place dans les collectivités de personnes âgées (maisons de retraite et EHPAD) permettant d’estimer les nombres d’établissements touchés, les nombres de cas et de décès survenus dans ces collectivités.

Nous surveillons les passages aux urgences hospitalières pour suspicion de Covid-19 grâce au réseau Oscour® (Organisation de la surveillance coordonnée des urgences), par jour et par classe d’âge, ainsi que la proportion d’hospitalisations suite à ces passages aux urgences.

En milieu hospitalier, nous suivons le nombre d’hospitalisations liées au coronavirus dont les passages en réanimation, données communiquées quotidiennement par le réseau SI-VIC (Système d’information pour le suivi des victimes). De plus, grâce aux données transmises par des es services de réanimation sentinelle (194 services sollicités), il est possible de décrire les caractéristiques épidémiologiques des cas de COVID-19 admis en réanimation en termes d’âge, de sexe, de comorbidités, de sévérité et d’évolution clinique.

Enfin, la surveillance de la mortalité est surveillée par plusieurs sources : mortalité spécifique au COVID-19 lors d’une hospitalisation (surveillance SI-VIC), mortalité suite à une hospitalisation en réanimation (réseau de services de réanimation sentinelle), ainsi que la mortalité en collectivité de personnes âgées. La certification électronique des décès qui couvre 20% de la mortalité nationale permet de décrire les patients COVID-19 décédés en termes d’âge, de sexe, de lieu de décès et de comorbidités.

Enfin, l’analyse de la mortalité toutes causes, c’est-à-dire quelle que soit la cause de décès permet, en quelques semaines, d’alerter sur une éventuelle surmortalité survenue dans la population Française en tenant compte de l’âge et de la zone géographique.

L’étude de surveillance GrippeNet, coordonnées par le Réseau Sentinelles, permet de plus de recueillir des données auprès de populations n’ayant pas recours au système de santé.

Enfin, nous avons mis en place un système d’enquêtes répétées en population pour évaluer les comportements, attitudes et pratiques face au COVID-19 ainsi que le niveau d’inquiétude qu’il génère.

Les forces de la surveillance COVID-19 mise en place en France sont la polyvalence et la complémentarité des indicateurs produits permettant ainsi le suivi et la description des patients touchés par le COVID-19 quel que soit leur lieu de prise en charge (en ville, à l’hôpital, en collectivités) et quelle que soit leur gravité (des personnes n’ayant pas recours au système de santé, patients suivis à domicile, en réanimation et jusqu’au décès). Ceci permet ainsi d’identifier les personnes les plus risques pour cette infection et de disposer d’une vue d’ensemble sur l’épidémie.

Des mesures de contrôle (mesures barrières, mesures de distanciation sociale, confinement de la population) ont été mises en place afin de limiter la diffusion du virus et d’en limiter les conséquences sanitaires. Les indicateurs de surveillance permettront de suivre l’impact de ces mesures sur l’évolution de l’épidémie.

Pour en savoir plus : COVID-19 : dispositif de surveillance