COVID-19 - En phase 2 de l'épidémie, en quoi consiste le travail d’enquête ?

Le travail d’enquête des épidémiologistes de Santé publique France en phase 2 de l'épidémie de COVID-19 consiste à rechercher et suivre les personnes contact.

Publié le 9 mars 2020

3 questions à Alexandra Mailles, épidémiologiste à Santé publique France

Qu’est-ce que le contact tracing ?AfficherMasquer

Le travail d’enquête des épidémiologistes de Santé publique France en phase 2 consiste à rechercher et suivre les personnes contact. Lorsqu’un cas est confirmé, une enquête en deux temps est ouverte. La première phase consiste en ce qu’on appelle l’enquête prospective, ou “contact tracing” en anglais, ou bien “recherche et suivi de contacts”. Il s’agit là d’identifier toutes les personnes qui ont été en contact direct avec le patient depuis le début de la maladie.

Une fois ces personnes identifiées, il va alors falloir évaluer le niveau de risque d’une possible contamination, en fonction de différents critères d’exposition : proximité du contact, durée, fréquence, etc… S’engage alors un suivi de ces personnes de 14 jours suivant le dernier contact avec le patient pour pouvoir surveiller d’éventuelles apparitions de premiers symptômes.   

Si le niveau de risque est élevé, le suivi sera actif, c’est-à-dire confinement à domicile, appels quotidiens et auto surveillance (prise de température 2 fois par jour) et obligation de signalement auprès du SAMU (15) à l’apparition des premiers symptômes.

La deuxième phase de l’enquête est rétrospective. Il s’agit là d’une investigation épidémiologique qui a pour but de remonter à l’origine de la contamination du patient. Les premières questions consistent à rechercher les causes les plus évidentes : cette personne revient-elle d’une zone à risque (Italie du Nord ou Chine par exemple) ? A-t-elle été en contact avec quelqu’un s’étant rendu dans une de ces zones ?

Si aucune exposition évidente ne ressort, nous allons interroger le patient pour remonter tout l’agenda des 15 jours précédents et tenter d’identifier toutes les personnes potentiellement malades avec qui il aurait pu être en contact durant cette période. Une attention particulière sera portée à toute personne fatiguée, faible, fiévreuse, etc... Il peut être nécessaire de solliciter les proches du patient (son conjoint, ses enfants, frères, sœur, etc...) si ce dernier n’est pas en mesure de répondre. Le but étant de collecter le maximum d’informations.

Si ces investigations ne donnent toujours rien, un travail sera effectué pour déterminer si le patient à assister à des évènements où sont rassemblés des personnes d’horizons différents.

Les informations concernant le patient (état de santé précis, résultats d’analyse, etc…) restent confidentielles. Il est important de rappeler que toutes les personnes interrogées ont un bénéfice à s’entretenir avec nous, pour leur propre santé.

Par qui sont menées ces investigations ?AfficherMasquer

C’est sous la coordination de Santé Publique France ainsi que des Agences Régionales de Santé (ARS) que toutes ces enquêtes sont effectuées. Elles mobilisent des épidémiologistes et des médecins inspecteurs de santé publique. En France, nous avons la capacité de faire appel à plusieurs centaines d’entre eux pour effectuer ce genre d’enquête.

Dans le cadre d’une enquête sur le cas d’un patient au mode de vie « discret » c’est-à-dire, peu de sorties, peu d’entourage, une à deux personnes sont mobilisées. A contrario, l’enquête sur un patient très actif socialement, pourra demander de nombreuses entretiens, et ainsi mobiliser une demi-douzaine de professionnels, parfois plus, pour mener à bien l’enquête.

Au niveau européen, c’est le Centre européen de Prévention et de Contrôle des Maladies (ECDC) qui est en charge de mutualiser les informations émanant des différents services nationaux. Au niveau mondial, c’est l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui a la charge de ce travail.

Quelles sont les méthodes utilisées pour ces enquêtes ?AfficherMasquer

De manière générale, pour mener les investigations, les personnes sont contactées par téléphone. Il arrive, de façon plus exceptionnelle, que les équipes de Santé publique France ou des Agences régionales de Santé se rendent sur place. Dans le cas du « cluster » des Contamines par exemple, des agents de ces deux entités sont allés procéder à une évaluation des risques au cas par cas dans une école. Nous devons nous adapter, car chaque situation est différente.

Si nos agents, au cours de l’enquête, s’aperçoivent qu’ils ont à faire à des personnes contacts malades au moment de l’investigation, une équipe du SAMU prend le relais, afin de les conduire à l’hôpital, où ils seront dépistés et hospitalisés, par précaution, dans l’attente des résultats, afin d’éviter tout risque de contaminations possibles ultérieurement.

En cas d’interview en face à face, nos agents sont tenus de respecter un certain nombre de mesure de protection : en cas de symptômes, le patient sera invité à porter un masque, avant que l’agent se protège également avec un autre type de masque.

Toutes ces procédures ont été mises en place sur la base de nos connaissances en surveillance épidémiologique, qui constitue l’une des missions principales de Santé publique France. Toutes ces connaissances se sont d’ailleurs enrichies avec l’épisode de la grippe A (H1N1) en 2009 mais aussi celui du Mers coronavirus en 2012, moins transmissible mais dont certaines problématiques étaient identiques à celles du Covid-19 ou encore avec l’épisode d’Ebola en Afrique de l’Ouest, de 2014 à 2016, et le retour des personnes de zones à risque.

Les moyens de prévention les plus simples sont souvent les plus efficaces :
Lavez-vous les mains, évitez les foules et mettez un masque dès l’apparition des premiers symptômes. C’est le meilleur moyen de protéger vos proches.