Vers un élargissement de la surveillance des effets sanitaires des perturbateurs endocriniens

Santé publique France publie les résultats de l’étude PEPS’PE, lancée en 2021, qui vise à prioriser, après une large consultation, les effets sanitaires à surveiller pour leur lien possible avec les perturbateurs endocriniens. 

Publié le 28 décembre 2023
Dans cet article

Les effets des perturbateurs endocriniens (PE)  sur la santé humaine sont complexes. Les données scientifiques suggèrent qu’ils peuvent altérer de nombreuses fonctions du système hormonal, appelé système endocrinien. Ils peuvent toucher la santé reproductive, ainsi que de nombreux autres organes et fonctions de l’organisme (altération du système immunitaire, troubles de la thyroïde, cancers hormonaux-dépendants, etc.). Des troubles du neuro-développement comme l’autisme, la baisse de quotient intellectuel ou des troubles métaboliques comme le diabète ou l’obésité sont également suspectés d’être associés à une exposition aux perturbateurs endocriniens. 

Dans le cadre de son programme santé environnement et de la Stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE), Santé publique France assure une surveillance spécifique en lien avec les perturbateurs endocriniens ciblée sur la santé reproductive depuis 2015. Afin d’intégrer les nouvelles connaissances scientifiques, le projet PEPS’PE, lancé en 2021, a pour objectif de prioriser les effets sanitaires liés aux PE et identifier ainsi les évènements de santé à intégrer dans la surveillance actuelle de l’agence. Basée sur une consultation large d’experts, cette étude est une étape préalable à la définition d’une nouvelle stratégie de surveillance des effets des perturbateurs endocriniens.

Qui a été consulté pour cette priorisation ?

Près de 500 personnes, composées d’experts scientifiques français et internationaux ainsi que de parties prenantes françaises, ont été sollicitées pour participer à cette étude et interrogées en fonction de leurs connaissances professionnelles ou personnelles, leur expertise et leur expérience professionnelle. L’objectif était d’obtenir une classification des effets sanitaires en quatre catégories de priorité, de la plus forte à la moins forte, comme outil d’aide à la décision pour identifier les événements de santé à intégrer dans la stratégie de surveillance de Santé publique France en lien avec les perturbateurs endocriniens.

Près de 60 effets sanitaires évalués et soumis à priorisation dans l’étude PEPS’PE

59 effets sanitaires sur la santé, suspectés d’être en lien avec une exposition aux perturbateurs endocriniens, ont été proposés dans notre étude et selon deux critères : le poids des preuves et l’intérêt épidémiologique et sociétal vis-à-vis de l’effet sanitaire. 

21 effets sur la santé sont évalués comme prioritaires à surveiller

Parmi eux, 6 effets de la santé reproductive sont déjà surveillés dans le cadre du programme de surveillance : cryptorchidie, hypospadias, puberté précoce, cancer du testicule, altération de la qualité du sperme et endométriose. Auxquels s’ajoutent l’infertilité et la diminution de la fécondité (non surveillés actuellement pour leur lien avec les perturbateurs endocriniens).

On retient également des effets métaboliques (surpoids et obésité, maladies cardiovasculaires, diabète de type 2 et syndrome métabolique), des troubles du neuro-développement de l’enfant (troubles du comportement, déficit intellectuel et troubles du déficit de l’attention), des cancers (cancer du sein, cancer de la prostate, lymphomes et leucémies chez l’enfant), et l’asthme. 

Par ailleurs, 22 effets ont été évalués avec une priorité faible ou non prioritaires lorsqu’ils présentent par exemple un poids des preuves faible ou modéré avec un intérêt plus ou moins fort de mise en place d’une surveillance. Enfin, 16 effets sanitaires n’ont pas pu être priorisés par manque d’experts scientifiques sur ces thématiques car aucun consensus n’a été atteint (ex : troubles osseux, troubles surrénaliens et troubles cutanés et oculaires).

Ces résultats indiquent donc la nécessité de faire évoluer le périmètre de la surveillance de l’Agence au-delà de la santé reproductive, en intégrant de nouvelles pathologies lorsque les données de surveillance sont disponibles.

Grâce aux premiers éléments de décision obtenus au travers de cette étude, Santé publique France va analyser la faisabilité de la mise en place d’une surveillance des effets classés comme prioritaires.

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Étude PEPS'PE : priorisation des effets sanitaires à surveiller dans le cadre du programme de surveillance en lien avec les perturbateu...

En savoir plus

Comment va évoluer la stratégie de surveillance en lien avec les perturbateurs endocriniens ?

Santé publique France structure une nouvelle stratégie de surveillance, dite intégrée. Cette surveillance s’appuiera sur la production d’indicateurs robustes issus de plusieurs sources de données (Système National des Données de Santé, cohortes…), ainsi que sur l’articulation de différentes méthodologies et outils en plus de l’analyse spatio-temporelle pour mesurer, analyser et interpréter l’impact des perturbateurs endocriniens sur la santé humaine. 

La nouvelle stratégie permettra de s’approcher du concept d’exposome, qui correspond à l’ensemble des expositions environnementales auquel est soumis un individu tout au long de sa vie. Elle sera, dans un premier temps, déclinée au niveau des effets sanitaires historiques de santé reproductive (cancer du testicule, hypospadias, cryptorchidie, qualité du sperme, endométriose, puberté précoce) et des cancers du sein, de la prostate, de l’ovaire et de l’endomètre.

A plus long terme, cette surveillance intégrée visant à caractériser les impacts sanitaires associés aux perturbateurs endocriniens constitue des perspectives intéressantes pour identifier in fine des stratégies et des actions de gestion et de prévention efficaces.