Transmission du virus Zika en Europe, Sud de la France, août 2019

Vector-borne transmission of Zika virus in Europe, Southern France, August 2019

Publié le 26 novembre 2019

Le virus Zika est un arbovirus transmis par des moustiques Aedes qui peut être responsable, entre autres, de malformations congénitales, de prématurité et de fausses couches si une femme enceinte est infectée. Jusqu’à récemment, aucune transmission autochtone vectorielle du virus Zika n’avait été documentée en Europe.
L’infection à virus Zika est une maladie à déclaration obligatoire, au même titre que les infections par le chikungunya et la dengue. Chaque année, durant la saison d’activité du vecteur, à savoir de mai à novembre, les professionnels de santé sont sensibilisés à l’importance de détecter et déclarer les cas d’arboviroses.
Le 1er octobre, le Centre national de référence des arbovirus confirmait un cas autochtone d’infection à virus Zika dans le département du Var. Une annonce qui a été largement médiatisée.
L’article* paru le mois dernier dans Eurosurveillance décrit l’ensemble des investigations déclenchées suite à cette annonce et les questions que cette nouvelle situation pose en termes de santé publique.

3 questions à Sandra Giron, Direction des régions - Paca, Santé publique France

À l’annonce de ce premier cas autochtone confirmé sur le sol métropolitain, quelles ont été les investigations et les mesures prises par les instances de santé publique locales et plus spécifiquement par Santé publique France en région Paca et Corse ?

C’est la première fois en Europe qu’une transmission vectorielle du Zika est identifiée.

La confirmation du cas par le Centre national de référence (CNR) des arbovirus a été immédiatement suivie d’investigations épidémiologiques, microbiologiques et entomologiques. Les investigations épidémiologiques, réalisées par Santé publique France en région Paca et Corse en lien étroit avec l’ARS Paca, visaient à détecter d’autres cas, à dessiner le périmètre de la zone affectée, et à vérifier l’hypothèse d’une transmission vectorielle.

Médecins généralistes, laboratoires médicaux et services d’urgences de la municipalité concernée et des communes alentours ont été contactés afin de repérer de manière rétroactive et prospective tout patient présentant ou ayant présenté des symptômes compatibles avec une infection à virus Zika. Parallèlement, une campagne en porte-à-porte chez tous les habitants dans un rayon de 100 mètres du cas index a été menée afin d’identifier d’autres cas. De plus, tous les habitants dans un rayon de 200 mètres autour du cas index, ainsi que les personnes ayant séjourné dans l’hôtel se trouvant dans cette zone, ont reçu un courrier les invitant à consulter en cas de symptômes compatibles avec une infection à virus Zika. Enfin, la base de données de la surveillance nationale des arboviroses a été explorée à la recherche d’un possible cas primaire parmi les cas importés. L’enquête en porte-à-porte a permis d’identifier deux autres cas confirmés d’infection à virus Zika. La date de survenue et la proximité géographique avec le cas index de ces deux cas était en faveur d’une même chaîne de transmission.

De son côté, l’EID Méditerranée (Entente interdépartementale pour la démoustication du littoral méditerranéen) a réalisé des enquêtes chez et autour du domicile des 3 cas identifiés et dans les lieux visités au cours de leur période de virémie. Des pièges à moustiques ont été placés dans les jardins de la zone affectée afin de connaître la densité vectorielle, de collecter des moustiques et de les tester pour la présence de virus.

Compte-tenu du risque de malformations congénitales, quelles sont les mesures prises envers les femmes enceintes vivant dans ou à proximité de ce périmètre ?

La transmission du virus de la mère à son fœtus peut survenir à tous les stades de la grossesse. Cette transmission dite verticale a été estimée à 26% en Guyane française lors de l’épidémie de 2016. Les médecins généralistes, sages-femmes et gynécologues-obstétriciens exerçant à Hyères et dans les communes environnantes ont été informés de la possible exposition de femmes enceintes au virus Zika et de la conduite à tenir pour le suivi de la grossesse des femmes enceintes ayant fréquenté la zone à risque entre le 1er juillet et le  30 septembre. Par ailleurs, il a également été recommandé aux femmes enceintes ayant fréquenté la zone de se rapprocher de leur médecin pour faire réaliser une recherche d'infection par le virus Zika.

Quelles sont les études qui restent à mener pour analyser le risque de transmission du virus Zika par l’intermédiaire du moustique Aedes albopictus (connu sous le nom de moustique tigre**) ?

La transmission du virus Zika par le moustique Aedes albopictus présent dans cette région de France depuis près de 10 ans, n’a jusqu’à présent jamais été démontrée. Lors de l’épidémie survenue en 2016 en Amérique, et en dépit de près de 600 cas importés en Europe, aucune transmission autochtone vectorielle n’avait été documentée. Des études sont actuellement menées pour identifier la souche du virus Zika en cause sur des prélèvements de cas humains et d’étudier plus précisément la compétence des populations d’Aedes albopictus du Sud de la France pour cette souche.

De plus, afin de connaître l’étendue de la transmission et identifier de possibles cas asymptomatiques non identifiés lors de la recherche active de cas, une enquête de séroprévalence menée par Santé publique France a été réalisée dans le quartier des cas autochtones les 14 et 15 novembre. L’ensemble de ces résultats contribueront à mieux cerner le risque de la transmission vectorielle du virus Zika en France métropolitaine.

Pour en savoir plus

Voir le dossier Zika

* Cette publication est un travail collaboratif de Santé publique France avec le CNR, l’ARS PACA Corse, l’EID et des professionnels de santé de Hyères.

** Le moustique tigre n’est pas porteur naturellement du virus. La transmission débute par la contamination d’un moustique après piqûre d’une personne malade de retour d’un voyage, la plupart du temps en zone intertropicale.

[1]  Vector-borne transmission of Zika virus in Europe, southern France, August 2019 Giron S, Franke F, Decoppet A, Cadiou B, Travaglini T, Thirion L, Durand G, Jeannin C, L’Ambert G, Grard G, Noël H, Fournet N, Auzet-Caillaud M, Zandotti C, Aboukaïs S, Chaud P, Guedj S, Hamouda L, Naudot X, Ovize A, Lazarus C, de Valk H, Paty MC, Leparc-Goffart I. Eurosurveillance, 24, 1900655 (2019). https://doi.org/10.2807/1560-7917.ES.2019.24.45.1900655