Maladie d'Alzheimer et autres démences

La maladie d’Alzheimer et autres démences sont les plus fréquentes des maladies neurodégénératives. Elles représentent une cause majeure de perte d’autonomie.

Mis à jour le 9 décembre 2022

Maladie d’Alzheimer et autres démences : données

Une prévalence qui augmente avec l’âge

En France, l’étude de cohorte PAQUID2 réalisée en Gironde fait référence dans le champ de l’épidémiologie de la démence du fait de la durée importante de son suivi et de la procédure diagnostique mise en œuvre avec une confirmation de tous les cas par un neurologue. A partir de projections à l’ensemble du territoire français, cette étude a permis d’estimer à environ 1 000 000 le nombre de personnes de plus de 65 ans qui souffriraient de démence en 2010 en France ; d’après des projections réalisées sous l’hypothèse d’une incidence annuelle constante (c’est-à-dire un nombre constant de nouveaux cas chaque année), le nombre de cas attendu en 2030 s’élèverait à environ 1 750 000.

Une possible diminution de l’incidence des démences

Les études récentes conduites au niveau international, suggèrent que l'incidence de la démence pourrait être en train de lentement diminuer3 »). L'amélioration du niveau d’études et de la prise en charge des facteurs de risque vasculaire sont les explications les plus fréquemment évoquées4, 5. En France, les données issues de deux cohortes en population générale, PAQUID et Trois-Cités6, mettent en évidence une diminution significative de l’incidence de la démence entre les années 1990 et 2000, mais chez les femmes uniquement. Il est possible que les femmes, partant d’un niveau d’études bien inférieur à celui des hommes au début du XXème siècle, aient bénéficié de manière plus importante de l’impact de l’amélioration générale du niveau d’études sur le recul de la démence.

Les cohortes PAQUID et Trois-Cités sont maintenant anciennes et ne permettent plus de produire des indicateurs de fréquence de la démence en France. De nouveaux outils de surveillance doivent être développés. Les données du système national des données de santé (SNDS1) sont de plus en plus utilisées pour la surveillance des maladies chroniques et représentent un outil possible pour la surveillance des démences7.

Dans ce cadre, un algorithme d’identification des personnes souffrant de démence a été développé par Santé publique France en utilisant les données de prise en charge au titre de l’Affection Longue Durée (ALD) « Maladie d’Alzheimer et autres démences », de remboursement de médicaments anti-démentiels et de recours à l’hospitalisation :

  • 525 000 personnes âgées de 40 ans et plus ont été repérées comme souffrant de démence, parmi les bénéficiaires du régime général de la Sécurité sociale vivants au 31 décembre 2014 ;
  • Le taux de prévalence de 22 pour 1 000 habitants augmente fortement avec l’âge passant de 2 ‰ chez les 40-64 ans à 60 ‰ au-delà ;
  • Le taux de prévalence est presque deux fois supérieur chez les femmes (29 ‰) par rapport aux hommes (15 ‰).

En rapportant ce nombre de cas bénéficiaires du régime général de la Sécurité sociale à l’ensemble de la population française de la même tranche d’âge, le nombre de personnes prises en charge par le système de soins avec une démence en France en 2014 est estimé à environ 770 000 (dont 68,7 % de femmes).

Taux de prévalence standardisés de Maladie d’Alzheimer et autres démences prises en charge au sein du régime général de la Sécurité sociale et nombre estimé N de cas pour la France, par sexe et classe d’âge, 2014

 

 

≥40 ans

 

 

40-64 ans

 

 

≥65 ans

 

 

 

Hommes

 

 

Femmes

 

 

Ensemble

 

 

Hommes

 

 

Femmes

 

 

Ensemble

 

 

Hommes

 

 

Femmes

 

 

Ensemble

 

Taux standardisés, régime général (‰)*

15

29

22

2

1

2

43

73

60

N estimé de cas, France entière

241 500

528 500

770 000

19 500

15 000

34 500

222 000

513 500

735 500

*Standardisés sur l’âge et le sexe pour l’ensemble de la population et dans les classes d’âge (40-64 ans et ≥65 ans) ; standardisés sur l’âge chez les femmes et chez les hommes séparément.

Un nombre de personnes atteintes de démence sous-estimé dans le SNDS1

Ces données doivent être interprétées avec précaution. En effet, les critères utilisés pour repérer les cas pris en charge ne permettent pas de repérer l’ensemble des malades. Les études de cohorte en population montrent que les personnes souffrant de démence ne sont pas toutes prises en charge par le système de soins. En effet :

  • elles ne sont pas toujours diagnostiquées, en particulier aux âges les plus avancés ;
  • elles ne sont pas toutes traitées par les médicaments dont l’efficacité n’est pas démontrée et la tolérance pas toujours bonne.

Ainsi, le nombre de personnes atteintes de démence est sous-estimé à partir des données du SNDS1. Une comparaison des estimations obtenues à partir du SNDSaux résultats issus d’études en populations française et européenne montre que, pour les sujets jeunes, les estimations obtenues dans le SNDSsont satisfaisantes. La sous-estimation concerne les sujets plus âgés, les prévalences de cas pris en charge étant en moyenne 1,6 fois inférieures à ce qui serait attendu en population générale selon l’étude de cohorte PAQUID.
En complétant les projections de l’étude PAQUID avec les estimations issues du SNDSpour les 40-64 ans, il est possible d’estimer à environ 1 200 000 le nombre de personnes souffrant de démence en 2014 en France.

La mortalité chez les personnes atteintes de démence

En France, en 2006, on comptait près de 46 000 certificats de décès avec mention de démence8. Il s'agit des dernières analyses disponibles concernant la mortalité. Parmi les personnes décédées avec une démence :

  • 70 % étaient des femmes,
  • L’âge moyen au décès était de 85,9 ans.

Les décès avec mention de démence représentaient 10,3 % des décès chez les personnes âgées de 60 ans et plus (7 % chez les hommes et 13,5 % chez les femmes).

Chez les personnes décédées avec mention de démence, les trois catégories de causes de décès les plus fréquentes étaient :

  • les maladies de l’appareil circulatoire (40,5 %),
  • les tumeurs invasives (11,9 %),
  • les pathologies endocriniennes (8,5 %).

Les décès par chute comptaient pour 2,4 % des décès avec mention de démence, ce qui représentait un risque de décès deux fois plus élevé que parmi les décès sans mention de démence.

Une fréquence de la démence plus élevée chez les hommes que chez les femmes

Peu de données sont actuellement disponibles concernant la fréquence de la démence chez les sujets jeunes en France alors que, chez les moins de 65 ans, les conséquences individuelles et sociétales de cette maladie sont dramatiques. De même, le rôle des comorbidités dans la survenue de la démence chez les sujets jeunes reste un sujet très peu documenté.

Des travaux préliminaires, conduits dans le système national des données de santé (SNDS), avaient montré que si les prévalences de la démence mesurées à partir de ces données sous-estiment largement la prévalence attendue chez les sujets âgés, celles-ci sont en bonne adéquation avec les données attendues chez les individus âgés de moins de 65 ans9.

En France, le nombre de cas prévalents et incidents de démence étaient estimés à 24000 et 5300 en 2016. Les prévalences et incidences augmentaient avec l’âge et étaient plus élevées chez les hommes que chez les femmes (respectivement 33% et 39 %). 

Les maladies cardio-neuro-vasculaires, neurologiques, psychiatriques et les lésions cérébrales traumatiques, sont d’importants facteurs de risque de démence chez les jeunes. Ces pathologies étant plus fréquentes chez les hommes, elles permettent d’expliquer 55% de la différence d’incidence entre les 2 sexes.

Il s’agit des premières estimations françaises de la fréquence de la démence chez les personnes âgées de moins de 65 ans. Nos travaux montrent également comment certaines comorbidités contribuent aux différences d’incidence observées entre les hommes et les femmes. Ces différences méritent d'être étudiées plus en détails afin de clarifier le rôle des facteurs de risque et des comorbidités associées au sexe ainsi que les différences dans l'accès aux soins de santé.

  1. Système national des données de santé (SNDS) : base de données médico-administratives contenant les prestations de soins de santé prises en charge par l’Assurance maladie (consultations et actes médicaux, médicaments, hospitalisations…), les causes médicales de décès et un échantillon de données provenant des organismes d’Assurance maladie complémentaire. Les données sont chaînées en respectant l’anonymat des personnes.
  2. Dartigues JF, Gagnon M, Michel P, Letenneur L, Commenges D, Barberger-Gateau P, et al. [The Paquid research program on the epidemiology of dementia. Methods and initial results]. Revue neurologique. 1991;147(3):225-30.
  3. Wu YT, Fratiglioni L, Matthews FE, Lobo A, Breteler MM, Skoog I, et al. Dementia in western Europe: epidemiological evidence and implications for policy making. The Lancet Neurology. 2016;15(1):116-24.
  4. Larson, E.B., K. Yaffe, and K.M. Langa, New insights into the dementia epidemic. N Engl J Med, 2013. 369(24): p. 2275-7.
  5. Norton, S., et al., Potential for primary prevention of Alzheimer's disease: an analysis of population-based data. Lancet Neurol, 2014. 13(8): p. 788-94.
  6. 3C study Group. Vascular factors and risk of dementia: design of the Three-City Study and baseline characteristics of the study population. Neuroepidemiology. 2003;22(6):316-
  7. Gallini A, Moisan F, Maura G, Carcaillon-Bentata L, Leray E, Haesebaert J, et al. Identification of neurodegenerative diseases in administrative databases in France: A systematic review of the literature. Rev Epidemiol Sante Publique. 2017.
  8. Brosselin P, Duport N, Bloch J. Mortality with Alzheimer's disease and dementia in France, 2006. Revue d'Épidémiologie et de Santé Publique, 2010, 58(4): 269-276.
  9. Carcaillon-Bentata L, Quintin C, Moutengou E, Boussac-Zarebska M, Moisan F, Ha C, Elbaz A. Peut-on estimer la prévalence de la maladie d’Alzheimer et autres démences à partir des bases de données médico-administratives ? Comparaison aux données de cohortes populationnelles. Bull Epidemiol Hebd 2016;(28-29):459-67.