Taux de participation au programme de dépistage organisé du cancer colorectal 2013-2014

Publié le 29 avril 2019

Après une phase pilote dans 23 départements métropolitains, le dépistage organisé du cancer colorectal a été généralisé à l’ensemble du territoire à partir de 2008. Depuis 2010, ce programme couvre tous les départements français, à l’exception de Mayotte (devenu département français le 31 mars 2011). Le dépistage est coordonné au niveau local par des structures de gestion départementales ou interdépartementales (au total 89 structures de gestion). Les données de participation, ainsi que les taux d’exclusions et les taux de personnes ayant un test positif, pour les périodes 2013 - 2014, présentées ici sont donc, pour la dernière année, celles issues du dépistage basé sur le test au gaïac.

Matériel et méthodes

Le cahier des charges des programmes de dépistage des cancers paru au Journal Officiel le 21 décembre 2006 (Annexe au n°295) stipule que les personnes de 50 à 74 ans doivent être invitées à se faire dépister pour le cancer colorectal tous les deux ans. Les indicateurs sont ainsi calculés sur deux ans, période au cours de laquelle l’ensemble de la population d’un département est invitée à participer au dépistage.

Calcul du taux de participation

Le taux de participation est le rapport entre le nombre de personnes dépistées et la population cible du dépistage (hommes et femmes de 50 à 74 ans) dont sont extraites les personnes exclues du dépistage pour raisons médicales. Il est défini par :

Le nombre de personnes dépistées, c'est-à-dire d’hommes et de femmes de 50 à 74 ans ayant effectué un test de dépistage au cours de la période évaluée (ici, du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014), et le nombre de personnes exclues du dépistage sont fournis par les structures de gestion selon un questionnaire annuel standardisé.

La population moyenne éligible est obtenue en faisant la moyenne arithmétique de la population cible Insee des personnes de 50 – 74 ans des années civiles 2013 et 2014, à laquelle il faut soustraire le nombre moyen (moyenne arithmétique) des personnes de 50 – 74 ans exclues du programme pour des raisons médicales au cours des deux années civiles (2013 et 2014).

Au niveau national et à des fins de comparaison entre départements, les dénominateurs utilisés pour le calcul des taux de participation sont les données de population fournies par l’Insee (projections 2007-2042, scénario central) calculées de manière identique sur tout le territoire. De cette population, sont soustraites les personnes qui sont exclues du dépistage temporairement ou définitivement pour raisons médicales. La définition des exclusions médicales est précisée par le cahier des charges (voir ci-dessus).

Calcul du taux d’exclusions

Le taux d’exclusion est le rapport entre le nombre de personnes exclues temporairement ou définitivement du programme de dépistage organisé du cancer colorectal (voir ci-dessus) et la population Insee cible du dépistage (hommes et femmes de 50 à 74 ans).

Le nombre de personnes exclues est fourni par les structures de gestion selon un questionnaire annuel standardisé.

La population moyenne éligible est obtenue en faisant la moyenne arithmétique de la population cible Insee des personnes de 50 – 74 ans des années civiles 2013 et 2014, à laquelle il faut soustraire le nombre moyen (moyenne arithmétique) des personnes de 50 – 74 ans exclues du programme pour des raisons médicales au cours des deux années civiles (2013 et 2014).

Calcul du pourcentage de tests positifs

Il s’agit du rapport entre le nombre de personnes ayant un test positif et le nombre personnes ayant un test analysable par les centres de lecture des tests de dépistage.

Ces informations sont fournies par les structures de gestion selon un questionnaire annuel standardisé.

Les classes d’âge

Une décomposition en classes d’âge de 5 ans a été retenue.

La classe 50-54 ans inclut les individus qui ont eu 50 ans dans le courant de l’année évaluée, même s’ils n’avaient pas atteint cet âge au moment du dépistage ; la classe 70-74 ans inclut les individus qui avaient 75 ans révolus au moment du dépistage, généralement suite à un retard de réalisation du test après réception de l’invitation envoyée jusqu’à 74 ans.

Standardisation des indicateurs

Les taux de participation, d’exclusions et le taux de personnes ayant un test positif sont calculés par département, par région et pour la France. Ils sont standardisés sur l’âge et le sexe par rapport à la population française 2009 (projection Insee 2007-2042, scénario central). Cette standardisation permet, en appliquant une même structure d’âge et de sexe (celle de la population française 2009) aux unités géographiques, de comparer les résultats entre ces unités (départements ou régions) et d’étudier les évolutions dans le temps des différents indicateurs étudiés.

Référentiels

Le référentiel européen préconise un taux de participation de la population cible supérieur ou égal à 45 % pour que le programme de dépistage soit coût-efficace. Ce référentiel est celui de l’ensemble des pays européens ayant mis en place un programme de dépistage organisé.

Résultats

Participation

Sur la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, la population des personnes âgées de 50 à 74 ans est estimée à 18,4 millions d’individus, dont au moins 16 millions ont été invités à participer au programme. Près de 5 millions ont réalisé un test, ce qui représente un taux de  participation de 29,8 % (voir tableau). Ce taux reste inférieur à l’objectif européen minimal acceptable de 45 % de participation, et loin derrière le taux souhaitable de 65 %1. Les femmes adhèrent davantage au programme que les hommes (31,5 % contre 27,9 %, respectivement), quelle que soit la classe d’âge observée (voir tableau). Le taux de participation augmente avec l’âge chez les hommes comme chez les femmes (voir tableau). Il augmente chez les hommes de 23,8 % entre 55-59 ans à 36,1 % à 70-74 ans et chez les femmes de 27,8 % entre 50-54 ans à 37,1 % entre 70-74 ans.

Comme les autres années, les taux de participation sont différents selon les départements (voir tableau). Seuls les départements du Haut-Rhin et de la Saône-et-Loire ont des taux de participation supérieurs au seuil minimal recommandé (46,6  et 47,5 %, respectivement), et 5 départements (Yonne, Ardennes, Ille-et-Vilaine, Bas-Rhin, Loir-et-Cher, Isère) présentent des taux qui lui sont proches (40-42 %). Au total, 51 départements ont un taux de participation supérieur à 30 %. Il est par contre particulièrement bas (< 20 %) pour les départements de la Corse, de Paris, de la Guyane, des Hauts-de-Seine et de la Lozère. Ces différences s’expliquent en partie pour cette année, par la mise en œuvre différenciée de la directive nationale du 6 octobre 2014, invitant les structures de gestion des dépistages organisés des cancers à anticiper l’arrêt de la distribution des tests au gaïac à partir du début du mois de novembre 2014. Aussi, les comparaisons spatio-temporelles des taux de participation 2013-2014 doivent, cette année plus encore, être interprétées avec une grande prudence. La prise en compte des délais d’invitations des personnes invitées à participer au programme à travers les méthodes d’analyse de survie pourrait avoir un intérêt majeur dans ce contexte. Elle ne peut cependant pas être appliquée compte tenu de la nature agrégée des données de participation remontées pour l’évaluation.
L’estimation de la fraction de la population éligible2 qui a été dépistée paraît être une alternative, et permet de pondérer le taux de participation estimé pour une période donnée, par le taux de couverture du programme d’invitation (proportion de la population éligible invitée durant le même temps). Sur la période 2013-2014, la fraction de la population éligible qui a été dépistée est estimée à 32,1 % (Différence relative : - 8,3 % par rapport à la période 2011-2012). Elle varie considérablement selon les régions et les départements : voir carte et tableau, 4,3 % en Corse à 60,4 % en Guadeloupe. Par rapport à la période précédente, fraction de la population éligible dépistée a progressé dans 23 départements, allant de +0,3 % pour le Finistère à +88,2 % pour la Guadeloupe, alors qu’elle a baissé dans 73 départements.

Exclusion

Certaines personnes sont exclues du dépistage, soit définitivement pour des raisons médicales (les antécédents de personnels ou familiaux d’adénomes ou de cancer colorectal, la polypose adénomateuse familiale, une maladie inflammatoire chronique intestinale, un cancer colorectal héréditaire non polyposique ou syndrome de Lynch) et orientées vers un suivi plus spécifique, soit temporairement du fait de symptômes ou pour avoir effectué dans les cinq ans une coloscopie ayant des résultats normaux. Ces exclusions doivent être régulièrement renseignées et le plus exhaustives possibles pour assurer la qualité du programme. Ce taux d’exclusion est de 12,6 % (+4,2 % par rapport à la période 2011 - 2012), soit un peu plus de 2 millions personnes exclues. Il est un peu moins élevé chez l’homme (12,4 %) que chez la femme (12,8 %). Ce taux augmente sensiblement avec l’âge des personnes, de 6,8 % entre 50-54 ans à 20,2 % entre 70-74 ans chez les hommes, de 7,7 à 18,5 % respectivement chez les femmes. On observe de grandes disparités départementales des taux d’exclusions qui varient de 4,7 % pour la Corse et la Guyane (+23,7 % et +42,7 % respectivement par rapport à 2011-2012)  à 19,4 % (+28,5 % par rapport à 2011-2012) pour le Bas-Rhin: voir carte et tableau. Les exclusions du programme sont d’autant plus fréquentes que le département participe depuis longtemps au programme (14,1 % pour les départements pilotes engagés avant 2008 dans le programme contre 12 % pour les départements non pilotes), puisqu’une proportion plus importante de personnes chez qui des lésions cancéreuses ou précancéreuses précédentes ou ayant eu une coloscopie normale depuis moins de 5 ans ont été identifiées lors des dépistages. Mais, ces disparités départementales du taux d’exclusion médicale soulignent également l’hétérogénéité de la qualité du recueil de l’information entre les départements. Le nombre de personnes exclues reste encore mal renseigné dans certains départements, en particulier du fait de la faible performance de leurs systèmes de recueil des exclusions médicales. Il existe au niveau départemental une diversité de sources de données exploitables pour documenter les exclusions médicales, mais celles-ci ne sont pas toujours accessibles par les structures de gestion. Cette situation interpelle sur l’urgente nécessité d'optimiser le recueil d’informations sur les exclusions médicales pour assurer la qualité du programme, en définissant une stratégie nationale permettant de mieux encadrer et accompagner les professionnels impliqués.

Tests positifs

Près de 5 millions de tests ont été réalisés dont un peu plus 103 700 se sont révélés positifs, avec un taux de positivité conforme à l’attendu (2,2 %) au regard des recommandations européennes. Ce taux de positivité est plus élevé chez les hommes (2,5 %) que chez les femmes (1,9 %), et augmente avec l’âge (voir tableau). Le taux de tests positifs passe de 2,4 % à 2,2 % soit une diminution de 8,3 % par rapport à la précédente période (2011-2012). Cette diminution est cohérente avec la répétition des campagnes de dépistage qui permettent d’identifier et d’exclure de la population cible du dépistage les personnes présentant des lésions colorectales précancéreuses ou cancéreuses, et de les orienter vers un suivi plus spécifique. 
On note une variabilité importante du taux de tests positifs entre les départements, avec des valeurs comprises entre 0,7 % pour la Martinique et 5,7 % pour l’Hérault (voir carte et tableau). Le taux de tests positifs reste également élevé en Guyane (3,9 %), dans le Calvados (4,2 %) et dans le Var (4,5 %). Il a augmenté entre les deux périodes dans 23 départements, en particulier plus fortement dans les départements du Calvados (de 3,3 % à 4,2 %), du Var (de 3,5 à 4,5 %) et de l’Hérault (de 3,3 à 5,7 %). Le taux de tests positifs a, par contre diminué dans le même temps dans un peu plus deux tiers (69) des départements. Cette baisse particulièrement marquée dans les départements de la Martinique (-41,7 %), du Vaucluse (- 44 %) et de la Côte-d’Or (- 48,8 %), est cohérente avec la répétition des campagnes de dépistage qui permettent d’identifier et d’exclure de la population cible du dépistage organisé les personnes présentant des lésions colorectales précancéreuses ou cancéreuses, et de les orienter vers un suivi plus spécifique par leur médecin.

Conclusion

Plus de cinq ans après la généralisation du programme de dépistage organisé du cancer colorectal à l’ensemble du territoire, la participation reste inégalitaire entre les départements, et toujours très insuffisante au regard du référentiel Européen en matière de dépistage organisé du cancer colorectal. Or, l’efficacité d’un programme de dépistage dépend fortement de l’adhésion de la population concernée. La lutte contre les inégalités d’accès et de recours aux programmes de dépistage (objectif 1 du plan cancer 2014-2019) passe par la mise à disposition sur l’ensemble du territoire de tests plus performants, plus simples d’utilisation afin de susciter une meilleure acceptabilité par la population concernée. Les meilleures performances de ce test sont également susceptibles d’augmenter la confiance et l’implication des médecins généralistes, dont on sait qu’elle est un facteur important pour susciter l’adhésion des patients au programme. Dans cette perspective, la Direction Générale de la Santé a, dans son arrêté du 23 septembre 2014, entériné le remplacement du test Hémoccult® II par un test immunologique (OC-Sensor®), plus sensible pour la détection des adénomes avancés et des cancers. Sa lecture par automate lui confère une meilleure fiabilité et reproductibilité. Le passage au test immunologique est prévu pour avril 2015.