Comparaison des taux d'accidents vasculaires cérébraux entre les femmes et les hommes : apports des Registres de Dijon, Brest et Lille, 2008-2012.

Publié le 8 mars 2016
Mis à jour le 6 septembre 2019

Introduction : l'accident vasculaire cérébral (AVC) a longtemps été sous-estimé chez les femmes, car il était plutôt considéré comme une maladie de l'homme. Il est désormais reconnu comme un problème majeur de santé publique chez la femme, au même titre que le cancer du sein, car sa fréquence n'est pas négligeable et parce que ses aspects cliniques, pronostiques, étiologiques, thérapeutiques et préventifs diffèrent de ceux de l'homme. Les données épidémiologiques sur les taux d'incidence et de mortalité de l'AVC chez la femme restent rares et controversées. Le but de ce travail était de comparer, sur la base des données des trois registres de population de Dijon, Brest et Lille, les taux d'incidence, d'attaque, de létalité et de mortalité à 28 jours de l'AVC chez les femmes et les hommes âgés de plus de 35 ans. Méthodologie : ce travail repose sur le recueil prospectif, de 2008 à 2012, des AVC de novo et récidivants inclus dans trois registres de population français existant à Dijon (152 000 habitants) depuis 1985, à Brest (368 000 habitants) depuis 2007 et à Lille (228 000 habitants) depuis 2008. Les taux d'incidence, d'attaque, de létalité et de mortalité à 28 jours ont été mesurés pour les AVC ischémiques, hémorragiques et d'origine indéterminée, de façon globale en groupant les trois registres et de façon spécifique pour chacune des villes, par tranches d'âge et pour chaque année de 2008 à 2012. Résultats : sur la période, 4 704 AVC de novo et 1 307 AVC récidivants ont été recensés, soit 21% de la cohorte. L'incidence annuelle globale de tous les types d'AVC, pour les deux sexes réunis, est de 248/100 000/an à Dijon, 255/100 000/an à Brest et 297/100 000/an à Lille, montrant l'existence d'un gradient nord-sud entre Lille et Dijon et entre Lille, Brest et Dijon pour les femmes. Ce gradient est encore plus net pour les taux d'attaque. Les taux d'incidence sont plus faibles chez les femmes dans les trois villes et continuent de baisser avec le temps à Lille et Brest pour rejoindre les taux dijonnais, déjà bas. Cette diminution progressive, avec le temps, chez les femmes est liée à la baisse de l'incidence des AVC ischémiques. On constate un taux de létalité à 28 jours plus élevé chez les femmes mais de façon non significative dans les trois villes réunies, associé à un taux de mortalité à 28 jours significativement plus faible chez les femmes dans les trois villes réunies. Enfin, on observe une baisse des taux de mortalité à 28 jours avec le temps uniquement chez les femmes, mais non significative. Cette baisse n'est constatée ni chez les hommes, ni pour les hémorragies cérébrales. Discussion : la relative concordance des taux d'incidence entre les trois villes valide les résultats publiés par le Registre dijonnais des AVC depuis 1987, et l'existence d'un gradient nord-sud rappelle le partage de facteurs de risque vasculaire avec les cardiopathies ischémiques. Le déclin significatif des taux d'incidence chez les femmes est une bonne nouvelle et incite à en connaitre les facteurs pour comprendre l'absence d'une telle tendance chez les hommes et dans les AVC hémorragiques. Conclusion : malgré la baisse significative dans le temps des taux d'incidence et la baisse non significative des taux de mortalité à 28 jours des AVC chez les femmes, le vieillissement de la population féminine en France va probablement être à l'origine d'une augmentation rapide de la prévalence des AVC chez les femmes en France.

Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2016, n°. 7-8, p. 109-17