Dépistage en routine du VIH en population générale en France. Estimation de l'impact clinique et du coût-efficacité.

Publié le 30 novembre 2010
Mis à jour le 6 septembre 2019

Contexte - En France, environ 40 000 personnes ne savent pas qu'elles sont infectées par le VIH. Bien que des études antérieures aient évalué le rapport coûtefficacité du dépistage en routine du VIH aux États-Unis, des différences entre la situation épidémiologique et les comportements face aux tests VIH justifiaient une analyse spécifique pour la France. Méthodes et principaux résultats - Nous avons évalué l'espérance de vie, le coût et le rapport coûtefficacité des stratégies alternatives de dépistage du VIH en France dans la population générale et dans des populations à risque, en utilisant un modèle mathématique alimenté par des données cliniques et de coût françaises. Nous avons comparé la stratégie de dépistage " actuelle ", visant les populations à risque d'infection par le VIH, à une stratégie de " dépistage universelle ", où un dépistage volontaire du VIH est proposé à l'ensemble des adultes âgés de 18 à 69 ans. Le rythme de dépistage s'échelonnait entre un test proposé de manière ponctuelle à un test proposé tous les ans. Les données alimentant le modèle incluaient l'âge moyen (42 ans), la prévalence des infections à VIH non diagnostiquées (0,10%), l'incidence annuelle du VIH (0,01%), l'acceptabilité des tests (79%), l'orientation vers les structures de soins (75%) et le coût du dépistage (43 euros). Nous avons effectué des analyses de sensibilité sur la prévalence des infections non diagnostiquées, l'incidence du VIH, les estimations de coûts, et nous avons analysé les bénéfices du traitement antirétroviral sur la transmission. Pour la " stratégie actuelle ", nous avons obtenu une espérance de vie de 242,82 mois de vie ajustés sur la qualité (QALM) chez les personnes infectées par le VIH et de 268,77 QALM dans la population générale. La réalisation d'un test de dépistage proposé de manière ponctuelle à l'ensemble de la population augmentait l'espérance de vie de 0,01 QALM dans la population générale et majorait les coûts de 50 euros/personne pour un ratio coût-efficacité de 57 400 euros par année de vie ajustée sur la qualité (QALY). Un dépistage plus fréquent dans la population générale augmentait la survie, les coûts et les ratios coût efficacité. Pour les usagers de drogues par injection (prévalence des non diagnostiqués 6,17% ; incidence du VIH 0,17%/an) et la population de Guyane française (prévalence 0,41% ; incidence 0,35%/an), un dépistage annuel était, comparé au dépistage tous les cinq ans, associé à des ratios coûtefficacité de 51 200 euros et 46 500 euros/QALY. Conclusions - Cette modélisation suggère que la réalisation d'un test de dépistage proposé de manière ponctuelle à l'ensemble de la population en France améliore la survie comparativement à la "stratégie actuelle" et est associée à un ratio coût-efficacité comparable aux autres interventions de dépistage recommandées en Europe de l'Ouest. Dans les groupes à risque, un dépistage plus fréquent se justifie d'un point de vue économique. (R.A.)

Auteur : Yazdanpanah Y, Sloan CE, Charlois Ou C, Le Vu S, Semaille C, Costagliola D, Pillonel J, Poullie AI, Scemama O, Deuffic Burban S, Losina E, Walensky RP, Freedberg KA, Paltiel AD
Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2010, n°. 45-46, p. 455-9