Le programme de dépistage organisé du cancer du sein français invite tous les deux ans les femmes de 50 à 74 à effectuer un examen clinique des seins et une mammographie de dépistage. Il propose un bilan diagnostic immédiat en cas de résultats suspect et une deuxième lecture de chaque mammographie normale en première lecture. Le programme est généralisé à tout le territoire français depuis 2004. Le dépistage est coordonné au niveau régional par les Centres Régionaux de Coordination de Dépistage des Cancers (CRCDC). Les taux de participation à ce programme, calculés pour les années 2005 à 2021, sont présentés ci-dessous, au niveau national, départemental et régional.
Matériel et méthodes
Le nombre de femmes dépistées est fourni à Santé publique France en février-mars chaque année par les CRCDC selon un format de données standardisé, agrégées par classes d’âge de 5 ans. La classe 50-54 ans inclut des femmes dépistées qui ont eu 50 ans dans le courant de l’année évaluée, même si elles n’avaient pas atteint cet âge au moment du dépistage ; la classe 70-74 ans inclut des femmes qui avaient 75 ans révolus au moment du dépistage, généralement suite à un retard de réalisation de la mammographie après réception de l’invitation envoyée jusqu’à 74 ans.
Au niveau national et à des fins de comparaison entre régions et départements, les dénominateurs utilisés pour le calcul des taux de participation sont les estimations localisées de population (ELP) de l’Insee. Chaque année, l'Insee estime la population des régions et des départements (France métropolitaine et DROM) à la date du 1er janvier. Ces estimations annuelles de population sont disponibles par sexe, par âge et par département. Les estimations sont établies à partir des derniers recensements de population, de l'exploitation statistique des bulletins d'état civil et de plusieurs autres sources administratives. Elles ont été utilisées pour calculer les populations-cibles du dépistage par tranche d’âge. En l’absence de données comparables dans le temps et dans les différents territoires, les exclusions du dépistage pour raison médicale ou familiales ne sont pas déduites du dénominateur.
Le taux de participation est calculé pour chaque année civile d’une part et pour chaque période de deux ans d’autre part. En effet, le nombre de femmes dépistées au cours d’une année peut être influencé par les stratégies d’invitation, en particulier dans les premières années de mise en place du programme. Les taux calculés sur deux ans permettent de prendre en compte une période au cours de laquelle toute la population cible devrait avoir été invitée et ainsi reflètent mieux la participation des femmes. En 2004, tous les départements n'avaient pas pu participer à une année entière de dépistage et certains départements d’outre-mer n’ont mis en place ce programme qu’en 2005. Les résultats sont donc présentés à partir de l’année 2005.
Les taux de participation bruts et standardisés sont présentés. Ils sont calculés par classe d’âge, par département, par région et pour la France entière. Les taux standardisés (sur l’âge en utilisant comme population de référence la population française de 2009, projection Omphale Insee 2007-2042, scénario central) permettent de comparer les territoires entre eux et au cours du temps.
Résultats
Tendances temporelles
Le taux national de participation pour la période 2020-2021 est de 46,6 %, soit 42,6 % pour l’année 2020 et 50,6 % pour l’année 2021 (voir tableau).
Après avoir augmenté jusqu’en 2011-2012 pour atteindre un pic à 52,3 %, la participation au programme était en diminution depuis 10 ans, pour toutes les tranches d’âge et toutes les régions. En 2020, le taux de participation avait nettement chuté globalement ainsi que dans toutes les tranches d’âge et tous les départements (voir figure, figure et tableau). Le premier confinement était l’explication principalement évoquée pour cette chute de participation. En effet, il y avait eu un arrêt des invitations, les CRCDC avaient fermé ainsi que les cabinets de radiologie. L’année 2021 montre un rattrapage pour toutes les tranches d’âges et tous les départements (voir figure, figure et tableau). On observe également une participation plus élevée en 2021 par rapport à 2019, pour toutes les tranches d’âge et la grande majorité des départements (voir figure, figure et tableau).
Les femmes étant invitées tous les 2 ans à faire un dépistage par mammographie, il est important de regarder les données sur des périodes de 2 années glissantes. On observe alors que la participation des années 2020-2021 reste inférieure à la participation 2018-2019, pour toutes les classes d’âge, toutes les régions de métropole et presque tous les départements (voir figure, figure et tableau). Si la participation de l’année 2021 a en partie rattrapé le déficit de l’année 2020, la participation de la période 2020-2021 reste inférieure à celle de la période 2018-2019. Une explication serait que la pandémie de COVID-19 a continué de perturber le dépistage du cancer du sein en 2021. Une autre explication serait que la baisse générale du dépistage observée depuis 2012 continue, pour les raisons suivantes : l’impact de la controverse sur les bénéfices et les risques du dépistage du cancer du sein ; la baisse de l’offre en sénologie impliquant des difficultés à effectuer des mammographies ; une augmentation des délais entre deux dépistages.
Les tendances temporelles sont relativement similaires par région, à l’exception de la Guyane (voir figure). Dans ce territoire, un décrochage est observé depuis 2016. Ce territoire a été très touché par la pandémie de COVID-19 avec un impact important sur l’organisation des soins, et l’impact sur la participation a peut-être été très important là-bas, en particulier pendant l’ensemble de la période 2020-2021.
Variations géographiques
La participation de la période 2020-2021 varie de 21,4 % en Guyane à 53,6 % dans le Centre-Val de Loire (voir tableau). On observe le même gradient géographique que pour les périodes précédentes, avec les niveaux de participation les plus élevés dans l’axe allant de la Bretagne à la région Rhône-Alpes (voir carte), et une participation très faible en Ile-de-France et dans le Sud-Est.
La participation par département, pour l’année 2021, varie de 29,2 % en Guyane à 65,7 % en Savoie. Pour la période 2020-2021, elle varie de 21,4 % en Guyane à 58,0 % en Côte d’Or et en Indre-et-Loire (voir figure et tableau).
Conclusion
Si la participation de l’année 2021 a en partie rattrapé le déficit de l’année 2020 dû à la pandémie de COVID-19 et aux confinements, la participation de la période 2020-2021 reste inférieure à celle de la période 2018-2019. Le COVID-19 a probablement continué de perturber le dépistage du cancer du sein en 2021, mais la baisse générale du dépistage observée depuis 2012 est peut-être en train de perdurer. Cependant, le dépistage organisé ne représente qu’une partie de la pratique de dépistage en France, et une partie des femmes le font en dehors des recommandations. En l’absence d’un code spécifique permettant d’identifier les mammographies réalisées dans le cadre d’un dépistage individuel dans le SNDS, l’estimation des pratiques hors programme est difficile et imprécise.