La prématurité en Guyane : particularités, évolution et facteurs de risque

Publié le 28 janvier 2020
Mis à jour le 27 janvier 2020

Contexte-En Guyane, le taux de prématurité reste élevé en dépit des efforts pour l'endiguer. Or, malgré des progrès, la mortalité périnatale, souvent associée à la prématurité, reste une cause importante de mortalité prématurée en Guyane. L'objectif de cette étude était d'analyser la prématurité dans le temps et dans l'espace, selon le type (prématurité globale, grande prématurité, prématurité spontanée, prématurité induite) et d'identifier les facteurs de risque dans le contexte Guyanais. Méthodologie-Une étude rétrospective descriptive et comparative a été menée, à partir des données du Registre d'issue de grossesse informatisé (RIGI) 2013-2014 décrivant 12 983 naissances viables sur l'ensemble des quatre établissements de santé du département. Ces données ont été complétées par une étude cas-témoins sur la grande prématurité au Centre hospitalier Andrée Rosemon de Cayenne (unique maternité de type 3 de la région) de février 2016 à janvier 2017. Résultats-La proportion de naissances prématurées était de 13,5% (1 755 sur 12 983), parmi lesquelles la proportion de prématurités spontanées était de 51,3% contre 48,7% de prématurités induites. Il existait une forte hétérogénéité spatiale entre l'Ouest Guyanais et les zones isolées où la prématurité était plus fréquente. À peine plus de la moitié (57,2%) de la population d'étude bénéficiait de la Sécurité sociale, et 9,3% n'avait aucune couverture sociale. L'absence de couverture sociale représentait un facteur de risque de prématurité avec un OR ajusté de 1,9 [IC95%=1,6-2,3] p<0,001. L'absence d'entretien prénatal était associée à un doublement du risque de naissance prématurée avec un OR ajusté de 2 [IC95%=1,2-3,5] p=0,007. D'autre part, en ce qui concerne les pathologies associées à la grossesse, le syndrome pré-éclamptique était la principale pathologie associée au risque de prématurité (OR ajusté de 6,7 [IC 95%=5,6-8,1] p=0,001). L'enquête cas-témoins montrait que l'absence de couverture sociale était aussi un facteur de risque de grande prématurité, mais uniquement spontanée. En revanche, les antécédents de naissances prématurées étaient des facteurs de risque de prématurité tant induite que spontanée. Les pathologies associées à la grossesse, telle que l'hypertension artérielle, la pré-éclampsie, le placenta praevia et le RCIU étaient exclusivement des facteurs de risque de prématurité induite. Le Gardnerella vaginalis et le streptocoque B, étaient des facteurs de risque de prématurité induite et non de prématurité spontanée. Conclusion-Les facteurs de risque sociaux et le mauvais suivi pendant la grossesse étaient associés à la prématurité spontanée. Le poids du syndrome pré-éclamptique comme facteur de risque de la grande prématurité induite en Guyane semble nettement plus important qu'ailleurs pour des raisons qui restent méconnues.

Auteur : Leneuve-Dorilas Malika, Bernard Stéphanie, Dufit Valentin, Elenga Narcisse, Carles Gabriel, Nacher Mathieu
Bulletin épidémiologique hebdomadaire, 2020, n°. 2-3, p. 51-60