MOBCO : une mobilisation de connaissances pour favoriser l’accès à la vaccination contre la Covid-19 des populations en situation de précarité

Les populations en situation de précarité, plus exposées à la Covid-19 et à ses conséquences, ont moins d’accès à la vaccination que la population générale. Afin de lever les obstacles à la vaccination contre la Covid-19, Santé publique France a mis en place une démarche de mobilisation et de partage des connaissances (MobCo) impliquant plus de 120 chercheurs, acteurs de terrain et décideurs. 

Publié le 9 février 2022

L’objectif de cette démarche est de définir collectivement des approches adaptées et des pistes d’action. Santé publique France publie aujourd’hui les principaux enseignements de cette démarche concernant la vaccination. Il en ressort qu’après une analyse contextuelle fine des leviers et des barrières à la vaccination, les stratégies à déployer doivent favoriser un parcours de vaccination capable de « ramener vers » les populations et d’« aller vers » leurs lieux de vie, en tenant compte de leurs attentes. Elles doivent ainsi s’appuyer sur les relations de confiance préexistantes entre les acteurs de terrain et les populations, et promouvoir une formation régulière et une information continue des acteurs de terrain. En lien direct avec ces travaux, deux actions ont été mises en place : le soutien à l’étude Prevac permettant d’estimer la couverture vaccinale contre la Covid-19 de cette population, qui complétera les estimations nationales du dispositif en population générale de VAC-SI et la création d’un dispositif de ressources pédagogiques adaptées, mis à jour tous les mois, destiné aux acteurs de terrain travaillant en première ligne auprès des personnes précaires.

Un enjeu majeur : les populations en situation de précarité sont moins bien vaccinées que la population générale

Les personnes sans domicile sont globalement moins vaccinées que la population générale. Pour ces personnes en situation de précarité, les obstacles à la vaccination sont multiples et peuvent varier selon les populations. Parmi eux, citons la difficulté d’accès aux services de santé, le vécu d’une mauvaise expérience pour les personnes sans domicile ; la crainte d’effets secondaires qui accentueraient les difficultés de la vie à la rue, la barrière de la langue, le manque d’information adaptée et la crainte d’être identifiées et expulsées.

Une démarche de co-construction pour des stratégies de vaccination adaptées et efficaces

Depuis l’automne 2020, afin d’améliorer la prévention de la Covid-19 auprès des personnes précaires, Santé publique France a mis en place la démarche de mobilisation des connaissances (MobCo). Initiée sur les stratégies de dépistage , elle a évolué vers les stratégies de vaccination. Elle consiste à rassembler les savoirs théoriques des chercheurs et les savoirs expérientiels des acteurs décisionnels et des acteurs de terrain, et de les partager en vue de développer de nouveaux savoirs intégrés durant la crise sanitaire. Dans le cadre de l’extension de la stratégie vaccinale contre la Covid-19, une première étape a permis d’identifier les stratégies efficaces pour faciliter le recours à la vaccination en général des populations en situation de précarité. Sur 531 articles et rapports identifiés dans la littérature internationale, 17 articles ont été retenus. Puis, un benchmark international a été mené permettant de recueillir les retours d’expérience des acteurs de trois pays (Danemark, Israël et Irlande) qui ont mis en place un programme national de vaccination auprès des populations en grande précarité dès février 2021. Enfin, des entretiens individuels auprès des acteurs de terrain - issus de l'administration publique, des associations et d’activités sectorielles de professionnels de santé et du secteur social - en France ont permis de prendre en compte leurs expériences et d’identifier leurs besoins suite à l’entrée en vigueur de la phase 4  du calendrier vaccinal.

Ces travaux préliminaires ont constitué la base scientifique des échanges (webinaire et ateliers participatifs) autour de quatre enjeux : l’intention et l’adhésion vaccinale ; les spécificités par population ; les stratégies d’information, d’éducation et de communication; les dispositifs et actions d’accompagnement. 

Des enseignements et de premières actions élaborées collectivement

Les premiers travaux menés ont permis d’identifier plusieurs points clés :  

  • L’importance de capitaliser sur les relations de confiance préexistantes avec les populations en situation de précarité. Et de structurer l’organisation du système de santé (définition et répartition claires du rôle de chacun des acteurs de l’exécution de la stratégie vaccinale) pour faciliter l’intervention des acteurs locaux et des associations.
  • La nécessité d’intégrer des actions réitérées et inscrites dans la durée d’information, d’éducation et de communication auprès des populations, au plus près de leurs lieux de vie et portées par les acteurs locaux formés à ces questions. 
  • La nécessité d’intégrer les actions de vaccination aux soins de santé et aux services courants, dans une démarche de « (r)amener vers » les populations et d’« aller vers » leurs lieux de vie. 
  • La prise en compte de facteurs limitants comme : la forte concurrence entre les besoins primaires : logement, sécurité, travail, accès à l’eau, alimentation ; la prise en charge des enfants ; un éventuel contexte de prise de substances addictives ; une grande mobilité ; un faible niveau de littératie en santé et de littératie numérique ; la barrière de la langue ; l’éloignement des systèmes institutionnels ; une faible perception de l’utilité de la vaccination ou de la menace de la Covid-19. Tous ces facteurs contextuels sont prégnants au sein de ces populations et nécessitent une analyse fine et spécifique, en situation et en temps réels.

D’une démarche à l’action

Par ailleurs, de ces travaux découlent également deux actions :

  • La mise en place par Santé publique France d’un dispositif de ressources adaptées et pédagogiques sous forme de questions réponses pour répondre aux besoins de connaissances des professionnels (travailleurs sociaux, médiateurs en santé, professionnels de santé) ou bénévoles en première ligne auprès des populations précaires et adaptées aux réalités de terrain. Ce dispositif co-construit est enrichi chaque mois suite aux retours des acteurs de terrain, il prend en compte et actualise les nouvelles connaissances. Il vise à faciliter les échanges autour de la vaccination contre la Covid-19 avec les publics en situation de précarité : personnes sans domicile, migrants, Gens du voyage, travailleurs du sexe, etc. S’abonner ici.
  • L’étude Prevac coordonnée par Epicentre en partenariat avec Santé publique France, dont l’objectif est d’évaluer la couverture vaccinale contre la Covid 19 des personnes très précaires qui échappent aux dispositifs de surveillance usuels, en relation avec plusieurs partenaires (Médecins sans frontières, Médecins du monde, Samu social, Interlogement 93, Croix Rouge française et les agences régionales de santé d’Île de France et de Provence Alpes Côte d’Azur). Les résultats de cette étude seront publiés prochainement. 

« La prise en compte des inégalités sociales et territoriales de santé (ISTS) et des populations vulnérables constitue un enjeu majeur pour Santé publique France. La démarche de co-construction MobCo mise en place par l’Agence est essentielle pour partager les savoirs des chercheurs, des décideurs et des acteurs et co-construire ensemble avec les acteurs de terrain les outils les plus adaptés dans le but de prendre les meilleures décisions pour améliorer la santé des plus démunis. Compte tenu de l’adhésion des acteurs concernés à cette démarche sur les deux premières thématiques (dépistage, vaccination), l’Agence évalue la faisabilité d’appliquer cette démarche à de nouvelles thématiques. Par ailleurs, pour une information claire et accessible à tous, l’Agence s’engage dans un processus d’évaluation et d’amélioration des outils d’Information, d’éducation et de communication auprès de ces populations. De nombreux partenariats avec la recherche sont établis pour mieux couvrir et comprendre les besoins de ces populations. Enfin, nous poursuivons l’intégration des déterminants sociaux dans les systèmes de surveillance de Santé publique France à l’échelle géographique la plus fine possible afin de produire les meilleures connaissances possibles en appui aux politiques de prévention des populations vulnérables. », précise Stéphanie Vandentorren, coordonnatrice du programme inégalités sociales de santé à Santé publique France.

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Communiqué de presse

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