Comparaison de la surveillance des syndromes grippaux par les réseaux sentinelles en Martinique et en Guadeloupe au cours de la pandémie grippale A(H1N1) 2009 : apports d'une enquête téléphonique en population générale et de la surveillance hospitalière

Publié le 1 décembre 2011
Mis à jour le 6 septembre 2019

Position du problème. Les syndromes grippaux sont surveillés en Guadeloupe et en Martinique par un réseau de médecins sentinelles. Pendant la pandémie grippale A(H1N1)2009, l'incidence des syndromes grippaux estimée à partir de ces réseaux était supérieure en Martinique qu'en Guadeloupe alors que les caractéristiques démographiques des deux îles sont équivalentes. En octobre 2009, une enquête téléphonique auprès de la population des deux îles a été menée pour estimer le nombre de personnes ayant eu un diagnostic de grippe lors d'une consultation médicale depuis mai 2009. Ce travail compare les résultats de la surveillance sentinelle, de l'enquête téléphonique et de la surveillance hospitalière menées pendant l'épidémie entre les deux îles. Méthodes. Les réseaux sentinelles guadeloupéen et martiniquais sont constitués d'un échantillon de médecins généralistes volontaires, répartis géographiquement sur l'ensemble de chaque territoire qui rapportent les nombres hebdomadaires de syndromes grippaux. Les séries temporelles du nombre hebdomadaire de cas estimé ont été modélisées par une régression à composantes saisonnières de type Serfling. La borne supérieure de l'intervalle de confiance unilatéral à 95 % de la valeur moyenne attendue constitue le seuil épidémique pour la semaine concernée. L'enquête téléphonique a été menée du 2 au 12 octobre 2009 en Martinique et du 13 au 21 octobre 2009 en Guadeloupe, par un système d'interview téléphonique assisté par ordinateur auprès de 507 personnes en Martinique et 508 en Guadeloupe sélectionnés par la méthode des quotas et représentatifs des individus âgés de 15 ans et plus. Résultats. L'épidémie a duré 12 semaines dans les deux îles, du 3 août au 25 octobre en Martinique et du 17 août au 8 novembre en Guadeloupe. Entre août et septembre, le taux d'attaque a été estimé en Martinique à 5,52 % (IC95 : 5,23-5,83) par le réseau sentinelle contre 8,3 % (IC95 : 6,0-11,0) par l'enquête téléphonique. En Guadeloupe, il était de 2,13 % (IC95 : 1,97-2,24) selon le réseau sentinelle et de 6,9 % (IC95 : 4,8-9,5) selon l'enquête téléphonique. Le nombre de cas confirmés hospitalisés était équivalent dans les deux îles. Conclusion. Ces résultats suggèrent une tendance à la sous-estimation du réseau sentinelle en Guadeloupe. Cependant, cela est à nuancer par l'observation des résultats de la surveillance hospitalière. Le nombre de passages aux urgences hospitalières reste en faveur d'une plus grande incidence en Martinique où le moindre recours au prélèvement des cas hospitalisés de syndromes grippaux pourrait expliquer, en partie, les différences observées concernant les taux d'hospitalisation, de gravité et de létalité pendant l'épidémie entre les deux îles.

Auteur : Ledrans M, Cassadou S, Chappert JL, Quenel P
Revue d'épidémiologie et de santé publique, 2011, vol. 59, n°. 6, p. 401-8