Environnement social précoce, usure physiologique et état de santé à l'âge adulte : un bref état de l'art.

Publié le 7 juin 2016
Mis à jour le 29 août 2019

Le concept d'incorporation biologique de l'environnement, en particulier social, désigne la façon dont le social devient biologique. Une incorporation biologique différentielle en fonction des groupes sociaux, en réponse à des environnements socialement différenciés, pourrait expliquer en partie comment se construisent le gradient social de santé et donc in fine les inégalités sociales de santé. Une question clé est de savoir comment mesurer la réalité physiologique ou l'expression biologique de cette incorporation chez l'humain. Le concept de charge allostatique (CA) renvoie à l'idée d'une usure biologique globale, découlant de l'adaptation à l'environnement via les systèmes de réponse au stress. La CA représente ainsi le prix payé par l'organisme au cours du temps pour s'adapter aux demandes de l'environnement. En pratique, la CA correspond à une mesure composite de divers systèmes physiologiques. Les résultats de la littérature, incluant des travaux que nous avons menés à partir de cohortes britanniques, montrent une capacité de la CA à prédire la santé future meilleure que chacun des biomarqueurs la composant pris séparément, ou que d'autres scores composites comme le syndrome métabolique. Les études portant sur les déterminants sociaux de la CA retrouvent par ailleurs un gradient social de la CA, se construisant dès l'enfance et tout au long de la vie. La CA pourrait donc être un proxy pertinent de l'incorporation biologique des environnements, notamment sociaux. Il reste néanmoins un certain nombre de questions qui méritent attention avant l'opérationnalisation en pratique courante de la CA dans une perspective d'interventions de santé publique, en particulier la validité des systèmes et des biomarqueurs utilisés et la prise en compte de l'aspect dynamique de cette mesure.

Auteur : Delpierre C, Barboza Solis C, Castagne R, Lang T, Kelly Irving M
Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2016, n°. 16-17, p. 276-81