Conséquences sanitaires de l'explosion survenue à l'usine "AZF" le 21 septembre 2001. Rapport sur la phase d'inclusion de la cohorte des travailleurs de l'agglomération toulousaine (cohorte santé "AZF")

Publié le 1 juin 2007
Mis à jour le 5 juin 2019

L'explosion de l'usine AZF est l'une des catastrophes industrielles les plus importantes de ces dernières décennies en France. Les conséquences ont été majeures (30 morts, plusieurs milliers de blessés). Les travailleurs et les sauveteurs de l'agglomération toulousaine ont été particulièrement exposés. A la suite de l'enquête transversale menée de septembre 2002 à avril 2003 dans la population des travailleurs et des sauveteurs, une cohorte de volontaires a été mise en place en mai 2003. La cohorte santé "AZF" compte 3 006 personnes qui seront suivies pendant cinq ans. A l'inclusion, les volontaires ont été invités à bénéficier d'un bilan de santé. Ils ont également répondu à un autoquestionnaire explorant : le parcours professionnel, la santé mentale et les troubles sensoriels, en particulier ORL. Les résultats présentés dans ce rapport concernent la phase d'inclusion. La survenue d'épisodes de chômage, d'arrêts maladie ou une rupture dans l'évolution de carrière depuis septembre 2001 ont rarement été rapportés par les cohortistes (moins de 2 %). Aucun lien entre la survenue de ces accidents de carrière et les indicateurs de niveaux d'exposition n'a pu être mis en évidence. Cette apparente absence d'effet de l'explosion sur la vie professionnelle est probablement en rapport avec des limites méthodologiques. L'évaluation de la santé mentale par l'autoquestionnaire standardisé GHQ 28 montre une "détresse psychique" qui touche 47 % des volontaires. La prévalence est nettement supérieure chez les femmes (60 %) que chez les hommes (40 %). Elle diffère selon la catégorie socioprofessionnelle, les ouvriers et les artisans commerçants étant les plus touchés. Chez les hommes, la "détresse psychique" est d'autant plus fréquente qu'ils ont été exposés à différents indicateurs : impression d'avoir respiré des toxiques ou que les bâtiments s'effondraient, existence de symptômes psychiques dans les suites immédiates de la catastrophe, antécédents de dépression, épisodes de chômage technique ou une délocalisation du lieu de travail. Chez les femmes, la "détresse psychique" est plus fréquente lorsqu'il existe au moins un antécédent dépressif ou une atteinte d'un proche à la suite de la catastrophe. Concernant la pathologie ORL, les signes les plus fréquents sont l'hypoacousie (34 % des hommes et 27 % des femmes) et les acouphènes (respectivement 25 % et 19 %). On retrouve un gradient des symptômes selon la distance personnelle. A l'audiogramme, les déficits auditifs prédominent dans la zone des hautes fréquences et sont d'autant plus fréquents que les personnes se trouvaient à proximité du lieu de l'explosion. Ce travail met en évidence des liens entre la catastrophe industrielle et la "détresse psychique". Son atout majeur repose sur la prise en compte de deux sources de données indépendantes et non concomitantes pour mesurer les expositions et les conséquences sanitaires et professionnelles. Il souligne la nécessité d'être attentifs aux troubles auditifs, en particulier pour les personnes qui se trouvaient proches du lieu de l'explosion. Il ne constitue que la première étape de l'étude longitudinale, mais justifie la nécessité de s'intéresser aux effets à moyen et long terme. (R.A.)

Auteur : Diene E, Cohidon C, Carton M
Année de publication : 2007
Pages : 84 p.