Exposition professionnelle des viticulteurs aux pesticides arsenicaux : prévalences d'exposition entre 1979 et 2000

Publié le 22 mai 2018
Mis à jour le 9 décembre 2023

Introduction : les pesticides arsenicaux, unique solution chimique utilisée en viticulture jusqu'en 2001 pour lutter contre l'esca, sont classés cancérogènes certains. L'estimation du nombre de personnes exposés et le calcul des prévalences d'exposition des travailleurs de l'agriculture n'ont jamais été réalisés. Méthodes : les travailleurs agricoles ont été identifiés grâce aux recensements agricoles (1979/1988/2000). Ont été distingués les travailleurs des exploitations viticoles professionnelles (seules utilisatrices d'arsenic) de celles cultivant la vigne de manière récréative. Les expositions ont été évaluées en utilisant une matrice cultures-exposition spécifique (Matphyto-Arsenic). Les indicateurs d'exposition ont été calculés en accord avec les années des recensements agricoles. Les effectifs des travailleurs exposés ont été calculés en utilisant les probabilités d'usage de Matphyto-Arsenic et les effectifs de la main-d'oeuvre des exploitations viticoles professionnelles. Les prévalences d'exposition ont été calculées en comparant ces effectifs exposés avec les effectifs des autres travailleurs agricoles. Résultats : entre 1979 et 2000, les effectifs exposés ont diminué de près de 40% : de 101 359 à 61 376, parallèlement à la baisse de plus de 50% des effectifs dans les exploitations viticoles. La prévalence d'exposition parmi la main d'oeuvre familiale de l'ensemble des exploitations agricoles en France métropolitaine est restée stable (3,6% à 4,2%) sur la période étudiée. Elle a augmenté parmi la main-d'oeuvre familiale et la main-d'oeuvre salariée des exploitations cultivant la vigne dans un but récréatif ou professionnel (10,5% à 19,6%) et chez celles cultivant la vigne dans un but exclusivement professionnel (20% à 25%). Discussion : cette étude est la première à documenter la prévalence d'exposition et les effectifs de viticulteurs exposés aux dérivés arsenicaux. Bien qu'interdits depuis 2001, il semble important, du fait de leurs effets cancérogènes avérés, de leur latence et des effectifs conséquents calculés, de sensibiliser les médecins (du travail et généralistes) ainsi que les travailleurs pour un meilleur suivi post-professionnel et, le cas échéant, une reconnaissance en maladie professionnelle.

Auteur : Spinosi Johan, Chaperon Laura, Jezewski-Serra Delphine, El Yamani Mounia
Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire, 2018, n°. 12-13, p. 241-245