Quels sont les traitements médicamenteux de l'état de stress post-traumatique ?

L’efficacité du traitement médicamenteux des troubles psychotraumatiques est reconnue. Celui-ci doit être associé à une démarche psychothérapique. 

Publié le 29 avril 2019

L’efficacité du traitement médicamenteux des troubles psychotraumatiques est reconnue depuis plus de 30 ans. Il est important de noter que prendre un médicament pour lutter contre les symptômes n’est pas le signe d’un échec. Le traitement médicamenteux doit être associé à une démarche psychothérapique et ne se prend pas seul. Les médicaments peuvent favoriser l’efficacité de la nécessaire démarche psychothérapique.

Depuis une dizaine d’années, ni l’intérêt ni l’efficacité des approches pharmacologiques ne sont remises en cause dans le domaine de la psychotraumatologie. Historiquement, les années 80 ont vu la construction, dès la reconnaissance du trouble dans les classifications, des toutes premières études cliniques qui tentaient d’évaluer l’efficacité des traitements antidépresseur dans l’état de stress post-traumatique. Les données sont actuellement claires et relativement consensuelles au point d’ailleurs de disposer de véritables recommandations.

Les raisons d’un médicament / Objectif de la prise en charge médicamenteuse

La diversité des symptômes, ajoutée à la forte comorbidité et à la complexité des interactions entre des phénomènes neurobiologiques et l’adaptation du sujet à l’événement laisse envisager autant de pistes d’actions pharmacologiques sur les différents systèmes impliqués : système nerveux central, axe hypothalamo-hypophysaire, voies catécholaminergiques ou sérotoninergiques.

Cette efficacité a été démontrée au travers d’études contrôlées et d’essais ouverts robustes au point qu’outre des recommandations de sociétés savantes et des conférences de consensus, certaines molécules aient obtenu des indications officielles dans de nombreux pays d’Europe et d’Amérique du Nord.

Les significations particulières que peut revêtir cette prescription doivent être abordées avec le patient (échec à faire face, impression d’avoir basculé dans la folie, attente magique de gommage du trauma …). Le prescripteur tentera donc, dans une nécessaire alliance thérapeutique avec le patient, de définir les objectifs recherchés par le traitement médicamenteux en tenant compte du contexte dans lequel il s’inscrit. Citons en vrac : contrôle des réactions biologiques et physiologiques du stress, restauration des stratégies d’adaptation, diminution du handicap et amélioration de la qualité de vie, réduction des symptômes liés à une éventuelle comorbidité… Outre la réduction des symptômes cibles des différents registres du TSPT (répétition/évitement/hyperéveil), un bénéfice sera ainsi recherché sur les symptômes dépressifs, l’anhédonie (diminution ou perte de la perception de plaisir), les manifestations dissociatives ou l’impulsivité. Un bénéfice est également à attendre pour le contrôle des fréquentes comorbidités : dépression, autres troubles anxieux, abus de substance psychoactive et comportements suicidaires.

Les médicaments utilisés

A l’heure actuelle, un consensus se dégage dans la littérature au travers de nombreux travaux contrôlés qui tous reposent sur des outils validés, des méthodologies robustes et des échantillons suffisamment larges. L’efficacité globale est significative pour des molécules qui diminuent incontestablement l’intensité de l’ensemble des symptômes, aident à la récupération clinique et semblent largement restaurer la qualité de vie et le fonctionnement global des sujets présentant un trouble de stress post-traumatique (ESPT) caractérisé. A côté d’essais ouverts nombreux et solides, de très nombreuses études contrôlées, randomisées en double aveugle versus placebo, ont été montées ces dernières années. Elles concernent plus de 20 molécules de plusieurs classes thérapeutiques différentes.

Objet de nombreux travaux concluant à leur efficacité et leur tolérance, les inhibiteurs spécifiques de la recapture de la sérotonine (ISRS) représentent actuellement la classe de première intention dans la pharmacologie de l’ESPT constitué. La fluoxétine a été la première étudiée et les résultats attestant de son efficacité spécifique, c’est-à-dire en dehors de toute activité antidépressive, ont été répliqués dans plusieurs travaux contrôlés. 

La sertraline et la paroxétine ont obtenu dans de très nombreux pays une indication officielle dans le traitement de l’ESPT constitué. Ces autorisations de mise sur le marché ont été étayées par des travaux multicentriques contrôlés solides effectués sur des populations importantes. 

La nefazodone et la trazodone ont montré une efficacité intéressante mais sont très peu utilisées en France.

La classe des anticonvulsivants est promise à un bel avenir. L’utilisation de la carbamazépine, du topiramate ou du gabapentin, seuls ou en association à des ISRS, a été considérée comme efficace ainsi que la lamotrigine.

Les neuroleptiques classiques ont montré une efficacité ciblée sur certains symptômes associés à des TSPT chroniques, complexes et résistants. Actuellement, des antipsychotiques atypiques tels olanzapine, rispéridone ou quétiapine ont fait preuve d’un intérêt clinique, notamment à faible posologie et en traitement adjuvant aux ISRS.

Ces dernières années ont également vu l’émergence de guidelines, principalement via l’ISTSS (International Society for Traumatic Stress Studies) et le NICE (National Institute for Health and Care Excellence). Bien qu’elles ne remettent pas formellement en question les résultats précédents, elles concluent néanmoins à la nécessité de poursuivre encore les travaux, tant pour la classe des antidépresseurs sérotoninergiques et tricycliques (fluoxétine, sertraline, paroxétine, venlafaxine, amitryptiline et imipramine) que pour les anticonvulsivants (carbamazépine, divalproex, lamotrigine, tiagabine et topiramate) et les antipsychotiques (olanzapine et rispéridone). De telles consignes sont également de mise pour les autres molécules : clonidine, cortisol, d-cyclosérine, kétamine, oxytocine, broforamine, prazosine et propranolol. Du côté de l’ISTSS, l’efficacité de la quétiapine semble représenter un très bon niveau de preuve scientifique, en tous les cas supérieur aux IRS. 

Signalons enfin le développement très récent des psychothérapies chimiofacilitées, probable voie d’avenir encore insuffisamment exploré dans la prise en charge des troubles psychotraumatiques.

Références 

Ducrocq F, Vaiva G, Cottencin O. Traitement pharmacologique des troubles psychotraumatiques.  Psychothérapies des victimes. Paris: Dunod; 2006. p. 41-5.
Bastien DL. Pharmacological treatment of combat-induced PTSD: a literature review. Br J Nurs. 2010;19(5):318-21.

[English] Pharmacotherapy for post traumatic stress disorder (PTSD). Stein DJ et al. Cochrane database of systematic reviews, 2006

Bisson, J. I., Berliner, L., Cloitre, M., Forbes, D., Jensen, T. K., Lewis, C., . . . Shapiro, F. (2019). The International Society for Traumatic Stress Studies New Guidelines for the Prevention and Treatment of Posttraumatic Stress Disorder: Methodology and Development Process. J Trauma Stress, 32(4), 475-483. doi:10.1002/jts.22421

Post-traumatic stress disorder. NICE guideline Published: 5 December 2018. www.nice.org.uk/guidance/ng116 

Texte rédigé par le Dr François Ducrocq, psychiatre CUMP Zône Nord, CHRU de Lille, et le Pr Guillaume Vaiva, professeur de Psychiatrie, CHRU de Lille