Marketing social : de la compréhension des publics au changement de comportement

A l'occasion de la publication de l'ouvrage 'Marketing social : de la compréhension des publics au changement de comportement' en novembre 2019, découvrez l'entretien croisé avec les auteures Karine Gallopel-Morvan et Viêt Nguyen Thanh.

Publié le 15 janvier 2020
Couverture de l'ouvrage Marketing social : de la compréhension des publics au changement de comportement

Qu’est-ce que le marketing social ? Quels en sont les principes, les outils ? Que signifient les 5 C ? En quoi une campagne de marketing social est-elle efficace pour modifier les comportements favorables au bien-être et/ou à la santé des individus ?... 

Pour répondre à ces questions : l'ouvrage 'Marketing social : de la compréhension des publics au changement de comportement' auquel ont collaboré de nombreux professionnels de Santé publique France est illustré par des conseils pratiques et des exemples de dispositifs de marketing social portés par Santé publique France, sur des sujets comme l’alimentation ou l’activité physique, la santé sexuelle, la vaccination, les conduites addictives...

Qui est à l’initiative de ce projet de manuel pratique et pédagogique sur le marketing social ?

VNT - Cela fait longtemps que les co-auteurs de cet ouvrage se connaissent (plus de 10 ans pour la plupart). Nous avons discuté à de nombreuses reprises de l’intérêt d’écrire un livre sur le marketing social en France. C’est un projet que nous avons en réflexion depuis plusieurs années, et nous nous sommes lancés dans la rédaction en 2019.

Il s’agit du premier ouvrage en français sur ce thème. Comment ce besoin a-t-il été identifié ?

KGM - Notre envie de rédiger cet ouvrage est partie de 3 constats : 1/ le marketing social est méconnu en France ; 2/ il n’existait pas d’ouvrage sur ce sujet en français ; 3/ nous sommes très régulièrement sollicités pour intervenir dans des conférences et/ou donner des cours sur le marketing social. Ces différentes raisons nous ont incités à rédiger un ouvrage commun EHESP – Santé publique France.

Quelle serait votre définition du marketing social et surtout quelle est selon-vous sa vocation principale ?

VNT - Comme le sous-titre de notre livre l’indique, le marketing social part de la compréhension des publics et mobilise différents outils et techniques pour obtenir un changement de comportement. L’association des termes « marketing » et « social » (qui peut sembler un oxymore) est née dans les années 1970 aux Etats-Unis.

Ce livre illustre trois exigences de Santé publique France : agir au front de la science pour la prévention, promouvoir les méthodes et les exemples de succès pour la santé des populations, coopérer avec les meilleures écoles de santé publique.
Geneviève Chêne, Directrice générale de Santé publique France

Le marketing social consiste en fait à utiliser les techniques du marketing commercial dans l’objectif d’encourager les comportements favorables au bien-être et/ou à la santé des individus. Pour ce faire, le marketing social s’appuie sur la segmentation, les marques, puis les « 5C » : proposer un Comportement (et des aides pour en faciliter son adoption) favorable à la santé et/ou au bien être ; minimiser les Coûts d’adoption de ce comportement ; favoriser la Capacité d’accès à ce comportement ; promouvoir ce comportement grâce à une Communication adaptée ; travailler avec des Collaborateurs ou des partenaires pour diffuser le comportement sur les lieux de vie des publics visés.

Quels sont les grands succès du marketing social en matière de santé publique ?

KGM - A l’étranger, de nombreuses campagnes se sont appuyées sur le marketing social : Truth, élaborée par l’American Legacy Fondation, dont l’objectif était d’inciter les adolescents (12-17 ans) à ne pas commencer à fumer ou à arrêter ; Verb conçue aux États-Unis par les Centers for Disease Control (CDC) pour promouvoir l’activité physique quotidienne des adolescents âgés de 9 à 13 ans.

En France, on peut bien sûr citer le dispositif Mois sans tabac, lancé en 2016 par Santé publique France, dont l’efficacité a été démontrée en matière d’incitation à l’arrêt du tabac. Pour rester sur des exemples « maison » on peut également citer les expérimentations telles que Chlamyweb, pour inciter les jeunes au dépistage des chlamydiae, qui donnera lieu très prochainement à un déploiement sur tout le territoire. Ou encore, le dispositif d’accompagnement du Nutri-Score qui bénéficie d’une notoriété de plus de 80% deux ans après sa mise en place.

Par quels professionnels le marketing social est-il d’ores et déjà utilisé et selon-vous qui aurait intérêt à recourir ?

VNT - À l’international, des acteurs de la santé ont recours depuis plusieurs années au marketing social : l’Institut national de santé publique du Québec, les CDC aux États-Unis, etc. De même, l’OMS déploie les programmes COMBI (Communication for Behavorial Impact) directement inspirés du marketing social. Le National Social Marketing Centre, créé en 2006 en Grande-Bretagne, s’appuie sur cette démarche pour construire ses programmes de prévention. En France, le marketing social gagne ses lettres de noblesse, ce qui se traduit par le déploiement de programmes de prévention qui reposent sur cette démarche et/ou le développement de formations dédiées.

Sur quels autres projets Santé publique France et l’EHESP collaborent ?

KGM - La recherche et la formation sont les deux grands domaines de collaboration de nos structures. Nous collaborons sur des projets de recherche ponctuels (en particulier sur le tabac et l’alcool) et, nous co-organisons par exemple le cours international d’épidémiologie appliquée (IDEA) avec le soutien de l’Ecole Pasteur CNAM, le CESPA, et de l’association EPITER.

Karine Gallopel-Morvan est professeure des universités en marketing social à l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique. Viêt Nguyen Thanh est responsable de l’unité Addictions de la Direction de la Prévention et de la Promotion de la Santé à Santé publique France. Elles sont toutes deux auteures de l’ouvrage « Marketing social De la compréhension des publics au changement de comportement », paru en novembre 2019 et co-écrit avec Pierre Arwidson (Santé publique France) et Gerard Hastings (Université de Stirling, Ecosse).