Santé Post Incendie 76. Pertinence d'une étude de biosurveillance à la suite de l'incendie survenu à Rouen le 26 septembre 2019

Publié le 5 juillet 2021
Mis à jour le 30 août 2023

Introduction Après l'incendie des entreprises Lubrizol et NL Logistique, survenu à Rouen le 26 septembre 2019, la Direction générale de la Santé a demandé à Santé publique France de proposer une méthodologie pour évaluer les répercussions à moyen terme sur la santé de la population concernée. Parmi les différentes réponses proposées, la pertinence de mettre en place une étude de biosurveillance des expositions de la population plusieurs semaines, voire plusieurs mois après l'incendie, s'est posée, en l'absence d'un dispositif de biosurveillance d'urgence disponible en France. Cette analyse fait l'objet du présent rapport. Méthode Ce rapport a été réalisé dans le cadre d'un groupe de travail de Santé publique France avec l'appui d'experts extérieurs. Il présente : i) la démarche à suivre pour étudier la pertinence d'une étude de biosurveillance, ii) l'application de cette démarche à la situation au regard des données disponibles iii) des informations (devenir dans l'organisme et effets sanitaires) sur les polluants identifiés sur la base de ceux potentiellement émis, listés par l'Ineris et l'Anses fin 2019, et les biomarqueurs disponibles correspondants, iv) une conclusion sur l'opportunité d'une étude de biosurveillance et v) des préconisations pour des situations futures et améliorer la démarche. Résultats et discussion De nombreux polluants ont pu être émis lors de l'incendie. Dans l'attente d'un bilan environnemental complet, l'analyse de la situation environnementale a reposé sur des données théoriques ou incomplètes concernant les substances rejetées et l'exposition de la population. Les substances, susceptibles d'être retenues dans le cadre d'une étude de biosurveillance sont des polluants organiques persistants, tels que les dioxines et les HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques) ; le plomb pourrait être retenu s'il s'avère qu'il a été émis lors de l'incendie. D'autres substances, comme le zinc, les composés perfluorés, les phtalates et les BTEX (certains composés organiques volatils), n'ont pas été jugées pertinentes. La principale voie d'exposition attendue pour les riverains du site plusieurs semaines après l'incendie est la voie orale via la consommation de produits locaux contaminés ou l'ingestion de poussières de sols contaminés par les retombées de l'incendie. En l'absence d'émissions aériennes chroniques, la voie par inhalation n'est plus à considérer. Une étude de biosurveillance visant à caractériser une éventuelle surexposition des populations exposées est faisable pour les dioxines, les HAP et éventuellement le plomb, au vu de la disponibilité de biomarqueurs pour ces polluants. Elle n'est pertinente que si une contamination des milieux et de la chaîne alimentaire pouvant être à l'origine d'une exposition chronique est mise en évidence. Elle reste difficile à mettre en oeuvre et l'interprétation des données sera délicate (pas d'interprétation sanitaire au niveau individuel, autres sources d'exposition possibles). Étant donné le passé industriel de la zone, il sera difficile d'isoler la contribution de l'incendie à l'imprégnation de la population riveraine. Pour ce faire, des données environnementales permettant de caractériser la signature chimique de l'accident seraient nécessaires, ainsi que le choix d'une population témoin pertinente à étudier. Par ailleurs, la plus-value de cette étude pour la gestion du risque sera limitée, de nombreuses mesures ayant déjà été prises. Préconisations La mise en place d'un dispositif de biosurveillance immédiatement après un accident est préconisée pour les situations futures afin de connaître la contamination de la population potentiellement exposée. Santé publique France intégrera la réflexion sur la mise en place d'un dispositif d'urgence dans la stratégie nationale du programme de biosurveillance.

Auteur : Fréry Nadine, Blanchard Myriam, Garnier Robert, Cochet Amandine, Maître Anne
Année de publication : 2021
Pages : 100 p.
Collection : Études et enquêtes