Exposition des enfants et des adolescents à la publicité pour des produits gras, sucrés, salés

Publié le 24 juin 2020
Mis à jour le 12 juillet 2021

Le marketing alimentaire, en particulier celui des produits à faible intérêt nutritionnel et à haute densité énergétique, fait partie de l'environnement obésogénique qui est à l'origine de l'épidémie d'obésité observée au niveau mondial chez les adultes et les jeunes. L'objectif principal de cette étude était de quantifier l'exposition des enfants et des adolescents à la publicité pour des produits gras, sucrés, salés (PGSS), et son évolution, notamment à la télévision. Dans ce cadre, le nombre de publicités télévisées pour des PGSS diffusées et vues par les enfants et les adolescents en 2015 et en 2018 a été calculé. L'étude a par ailleurs fourni des données de 2012, 2015 et 2018 sur l'évolution des équipements et des usages médias et sur les investissements publicitaires alimentaires, en particulier pour des produits gras, sucrés, salés. Cette étude a porté sur les 4-12 ans, les 13-17 ans et les 18 ans et plus. Les données sur l'équipement et les usages médias ont été recueillies via des études de Médiamétrie et d'Ipsos. Celles sur les investissements publicitaires l'ont été par Kantar Media. Un codage selon la qualité nutritionnelle des produits publicisés a été réalisé par Santé publique France. Deux profils nutritionnels ont été pour cela utilisés : le Nutri-Score et le profil nutritionnel de l'OMS, à des fins de comparabilité européenne. La quantification de l'exposition à des publicités télévisuelles pour des PGSS a nécessité la conjonction de données d'audience de Médiamétrie et de données de Kantar Media sur les jours et horaires de diffusion des publicités et du parrainage pour les produits et les marques alimentaires. En 2018, la télévision reste le média le plus regardé par les enfants de 4-12 ans (1h28 par jour) malgré une diminution de la durée de visionnage. Leur usage d'Internet a en revanche augmenté, atteignant 53 min par jour en 2018. Les adolescents passent eux 2h par jour devant Internet et 1h12 devant la télévision, soit 42 min de moins qu'en 2012. La tranche horaire comprise entre 19h00 et 22h00 (prime time) est la plus regardée, autant par les adultes que par les enfants et les adolescents. Les émissions TV les plus regardées par les enfants et les adolescents sont les fictions et les émissions de divertissements, programmes principalement diffusés entre 20h et 24h, une des tranches horaires où le plus gros volume de publicités est diffusé. Ainsi, bien que le temps passé devant la télévision par les enfants et les adolescents ait diminué, le temps quotidien de publicités vues entre 2012 et 2018 a augmenté, passant en moyenne de 7 min à 9 min par jour. Autre enseignement notable, les programmes jeunesse qui font actuellement l'objet d'interdiction de publicité sur les chaînes publiques et de mesure d'autorégulation de la part des industriels de l'agroalimentaire représentent 0,1% des programmes diffusés et moins de 0,5% des programmes vus par les enfants. Concernant l'usage d'Internet, l'activité la plus pratiquée par les enfants et les adolescents est de regarder des vidéos, suivie de l'usage des réseaux sociaux pour les adolescents. De nombreuses publicités sont diffusées sur ces sites et réseaux sociaux mais il est à ce jour impossible d'estimer l'exposition des enfants et des adolescents au marketing digital par manque de données déclarées sur les investissements et les ciblages. Les investissements publicitaires alimentaires (incluant les familles alimentation, boissons et restauration) sur l'ensemble des médias s'élèvent à 1,1 milliard d'euros nets et représentent 9,3% de l'ensemble des investissements nets estimés du marché publicitaire en 2018. Ces investissements sont majoritairement faits à la télévision (60%) et sur Internet (20%) en 2018, selon les estimations fournies par l'agence Dentsu. Cette part prépondérante des investissements télévisés est une particularité des annonceurs de l'alimentaire qui investissent davantage en télévision que les autres acteurs du marché. La part de la télévision a néanmoins diminué par rapport à 2012 (63%) et 2015 (67%) et résulte principalement d'une augmentation des investissements réalisés sur Internet. La restauration rapide, les chocolats et les boissons sucrées sont les trois secteurs qui font l'objet du plus gros montant d'investissements publicitaires alimentaires. Ils représentent un tiers de ces investissements. Les investissements publicitaires sur l'ensemble des médias pour les produits de Nutri-Score D et E, c'est-à-dire de plus faible qualité nutritionnelle, représentent 48 % des investissements alimentaires en 2018. Enfin, résultats majeurs et mesurés pour la première fois en France : les publicités vues à la télévision par les enfants, les adolescents et dans une moindre mesure par les adultes sont majoritairement des publicités pour des produits de Nutri-Score D et E. En 2018, ces publicités pour des produits Nutri-Score D et E représentent 53,3 % des publicités alimentaires vues par les enfants, 52,5 % des publicités vues par les adolescents, et 50,8 des publicités vues par les adultes. 87,5 % des publicités pour des produits Nutri-Score D et E sont vues aux heures où plus de 10% des enfants et des adolescents regardent la télévision;La moitié sont vues entre 19h00 et 22h00, heure où plus de 20 % des enfants et des adolescents sont devant la télévision. Ces résultats sont en faveur d'une restriction du marketing alimentaire pour les produits de faible qualité nutritionnelle, notamment à la télévision, aux heures où le plus grand nombre d'enfants et d'adolescents regardent la télévision. En outre, l'augmentation du temps passé sur Internet par les enfants et les adolescents laisse augurer une exposition bien plus massive aux publicités pour les PGSS, sans qu'il soit à ce jour possible de la mesurer mais pour laquelle l'encadrement semble tout aussi nécessaire.

Auteur : Escalon Hélène, Serry Anne-Juliette, Resche Chloé
Année de publication : 2020
Pages : 70 p.
Collection : Études et enquêtes