Analyse des attentes et du contexte local autour du bassin industriel de Lacq

Publié le 5 mai 2019

En octobre 2015, Santé publique France était saisie par la Direction Générale de la Santé (DGS) pour évaluer l’opportunité de la mise en place d’une surveillance épidémiologique autour du bassin industriel de Lacq (Pyrénées-Atlantiques).
En réponse à cette saisine, Santé publique France a développé une approche en plusieurs étapes: Une étude des attentes et du contexte local, deux études épidémiologiques, et une étude de santé déclarée.
L’analyse du contexte social, première partie de ce travail, est rendue publique aujourd’hui.

Pourquoi cette saisine ?

Le bassin industriel de Lacq, implanté dans les Pyrénées-Atlantiques au nord-ouest de Pau est un vaste complexe industriel né dans les années 1950 autour d’un gisement de gaz naturel. Dans les années 2000, une étude épidémiologique réalisée par l’université de Bordeaux a montré chez les riverains une surmortalité dans la zone à proximité du site industriel vis-à-vis des zones témoins plus distantes, chez les personnes âgées de moins de 65  ans, pour toutes causes confondues et par cancer.
En 2015, Santé publique France était saisie par la DGS suite au référé de la Cour des comptes portant sur la sécurité sanitaire de ce bassin industriel et à une forte mobilisation locale des élus et des citoyens.

Premiers résultats d’une approche en plusieurs étapes : l’analyse du contexte locale

L’objectif de l’étude du contexte local publiée aujourd’hui était d’identifier les perceptions et attentes des différents acteurs locaux à l’égard des liens entre santé et environnement autour du site industriel. Elle a été réalisée sous forme d’entretiens avec différents profils d’acteurs locaux (riverains, associations, salariés, professionnels de santé, industriels, élus locaux, représentants de l’Etat).

Plusieurs enseignements peuvent être tirés de cette étude :

  • L’axe emploi/économie est une préoccupation importante chez toutes les personnes interviewées.
  • L’axe santé/environnement apparait comme une préoccupation croissante avec des niveaux d’inquiétude et une perception du risque sanitaire variables selon les acteurs interrogés :
    • Les riverains expriment une certaine méfiance à l’égard des usines, notamment lorsque certains symptômes ou pathologies apparaissent (irritations, troubles respiratoires, nausées, troubles thyroïdiens..) ;
    • Les deux principales associations locales (Sepanso et Arsil) portent ces inquiétudes dans l’espace public  à travers diverses actions (juridiques, médiatiques, réunions publiques). Une évaluation de la fréquence de certains symptômes ou pathologies ne figurant pas dans les bases de données utilisées par les épidémiologistes a été demandée. Les associations expriment une méfiance à l’égard des autorités sanitaires et des industriels, et le souhait d’être informées sur les modalités de mise en œuvre des études épidémiologiques ;
    • Les professionnels de santé perçoivent un excès de pathologiesrespiratoires, digestives, hématologiques, thyroïdiennes touchant plus particulièrement les enfants et les travailleurs. Ils souhaiteraient être mieux informés par les autorités sanitaires et les industriels sur la question  des polluants et de leur impact sur la santé et collaborer d’avantage avec les représentants de la médecine du travail ;
    • Les syndicats et les médecins du travail perçoivent un excès de tumeurs solides et de leucémies chez les salariés du bassin industriel de Lacq. Ils rapportent une sous-déclaration des salariés eux-mêmes, craignant de perdre leur emploi ;
    • les industriels évoquent une amélioration globale de la situation par rapport aux premières années d’exploitation du site, avec l’arrêt des rejets (effluents liquides) dans les sols, l’amorçage d’opérations de dépollution et une diminution des rejets dans l’atmosphère. Pour eux, les résultats des mesures de qualité de l’air ne présentent aucun signe inquiétant.

Une prise en compte des enseignements du contexte local

Suite à ces enseignements, un certain nombre de mesures ont ou vont être mises en œuvre par Santé publique France et/ou l’Agence régionale de Santé. Les pathologies rapportées par les riverains, les professionnels de santé et les associations ont été intégrées dans l’étude de morbidité en cours. Une action de formation à destination des professionnels de santé locaux va être organisée. L’étude de santé déclarée participative sera mise en place avec une participation plus en amont d’acteurs locaux.

Les deux études épidémiologiques (étude de mortalité et étude exploratoire de morbidité) sont en cours et feront l’objet d’une prochaine publication.